Il y a quelques années, durant un mois de décembre, je me suis totalement cramé -en très peu de temps- en enchaînant des trajets vélotafs d'une 30-aine de km. N'ayant d'abord pas compris ce qui se passait (c'était impressionnant comme je me suis senti vidé d'un coup) je me suis renseigné partout sur le web et aie commencé à lire le livre "le cyclisme moderne" écrit par un médecin de sport, le dr. Mallet.
Si dans ce livre beaucoup d'informations ne concernent pas le cycliste de loisir que nous sommes (pour beaucoup d'entre nous), il n'en reste pas moins que notre corps fonctionne exactement de la même façon que celui des sportifs de haut niveau (la performance au moins), du coup je crois qu'il peut être conseillé de le lire à tout le monde qui s'intéresse un tant soit peu à comment fonctionne (et faire fonctionner) notre corps durant un effort sportif.
Depuis ce maudit mois de décembre ma façon de rouler à beaucoup changé. Mes sorties se sont rallongées, le vallonné s'est transformé en alpin, le vélomobile a laissé la place à d'autres vélos, etc.
J'ai terminé l'année passée avec 13.500 km au compteur et 190.000 mètres de d+, composé d'une multitude de petites sorties mais aussi d'un 400 alpin très exigeant combiné avec les 150 km pour y aller, d'un bcmf (aravis) rallongé de 100 km, 3 ou 4 sorties de 170 - 200 km montagnardes (je parle de montagnard quand le ratio d+ en mètre/distance en km dépasse les 2 %), et une dizaine de sorties entre 100 et 150 km dont certains avaient un ratio qui avoisinait les 3 % (p.ex, 130 km pour 4000 mètres de d+). La montagne ça vous gagne ;-)
Si j'écris ça ce n'est pas pour faire étalage d'une quelconque prétendue prestation, c'est juste pour faire remarquer que j'ai l'habitude de me faire un 'plan nutrition' pour chaque grosse sortie et que ça semble fonctionner.
Ce que je préfère en fait c'est de partir avec tout ce qu'il me faut en calories. Il me semble d'ailleurs que ceci est possible jusqu'à une distance d'environs 600km.
Je vais donc essayer de synthétiser un peu les différents informations que j'ai trouvé afin de rendre l'ensemble un peu digeste. Il est fort probable que beaucoup d'entre vous ont d'expériences autres, le principal est que ça marche pour vous.
LES FILIERES ENERGETIQUES
Notre système cardiovasculaire fait appel à différents filières énergétiques, qui interviennent chacun à certaines intensités d'effort et souvent par deux.
Lors d'un effort c'est d'abord la lipolyse qui se met au travail en brûlant des graisses (il y a pour environs 15 jours de marche en réserve dans le corps!), c'est une filière pas très rapide, du coup lorsque l'effort s'intensifie la glycolyse se met en route ( à partir de 70% de la fc max).
La glycolyse puise directement dans notre stock de glycogène, du glucose stocké dans les muscles et le foie.
Si dans tout le corps nous (enfin, les hommes entraînés) avons à peu près pour 4000 Kilocalories de glucose en réserve (1g de glucose = 4 kcal) or, cette quantité qui se trouve en grande partie stockée dans les muscles ne peut être mobilisé que localement. Cad, hors de question d'utiliser le glycogène des biceps pour les quadriceps p.ex.
Sans oublier que le cerveau ne peut-être nourri que par le glycogène.
Par conséquent les réserves de glycogène réelles ne dépassent pas vraiment l'heure et demi d'effort. Mais ils ont ceci de pratiques qu'ils peuvent bénéficier d'un apport durant l'effort qui pourra combler du moins partiellement à leur consommation.
Ensuite les chiffres divergent mais selon le dr Mallet le pic de lipolyse, qui précède de très peu son arrêt dans l'apport énergétique de l'effort, a lieu un peu en-dessous des 80% du fc max. Au-delà, son apport (de la lipolyse donc) devient négligeable et durant un petit moment il n'y plus que la glycolyse qui fournit de l'énergie avant que la filière anaérobique se met en marche.
Etant donnée que l'on parle de brevet ici -incompatible avec des efforts d'une telle intensité- je propose de ne pas entrer dans le détails pour ce qui concerne tout ce qui dépasse le pic de lipolyse.
Revenons à nos moutons, les brevets, mais pas sans faire un petit détour chez les pros.
Quelque soit le niveau d'entraînement d'une personne, ces seuils relatifs mentionnés ci-haut sont assez constants. L'entraînement permettra d'augmenter son volume d'éjection systolique, sa puissance musculaire etc mais les seuils des filières énergétiques ne bougent que très peu.
En regardant cette étappe du centième tour de France roulé par Laurens te Dam avec arrivée sur le Ventoux, on s'en rends bien compte: 240 km, 41 km/h de moyenne, 131 bpm en moyenne ... Et c'est logique, je vous expliquerai pour quoi.
Les coureurs du tour roulent tous les jours durant 3 semaines et, aussi entraînés qu'ils soient, leurs réserves ne sont pas tellement plus élevés que les nôtres. Du coup il est totalement exclu qu'ils enchaînent les étapes de façon hyper-intensive car la prise de glucose durant un effort ne pourra remplir les stocks que partiellement! Le reste c'est avant et après une étappe et un stock totalement épuisé nécessite 48 heures pour se refaire! Le rythme du peloton est donc calé sur la vitesse du métabolisme des cyclistes qui le composent et les contraintes de la durée d'un tour cycliste.
Au quotidien nous puisons environs 30% de notre énergie dans les lipides, 55% dans le glucose et 15% dans les lipides. Pour les sportifs la part de glucides peut monter à 60%.
La recherche médicale a démontré que le corps humain peut oxyder entre 60 et 70 grammes de glucose par heure, cad entre 240 et 280 kcal par heure.
Or, en effort intense nous dépassons largement ce que cet apport externe peut nous apporter. Et c'est la raison pour laquelle les efforts intenses ne peuvent pas durer très longtemps.
Par contre, les efforts d'intensité moindre bénéficient d'une réserve énergétique pratiquement inépuisable: les lipides qui apportent 9 kcal pour chaque gramme. Et si on sait qu'environs 15% de notre corps est composé de lipides, ça nous donne une réserve (dans mon cas, 72 kg) qui avoisine les 100.000 kcal!
Malheureusement il ne sont pas utilisables tel quel mais voilà, ça donne une bonne réserve 'de fond' qui nous aide à parcourir une bonne partie de nos brevets, du moment que l'on fasse attention à ne pas trop engager la filière glycolytique.
FAIRE UN PLAN D'ALIMENTATION
Lorsque je prépare un brevet, je me fait une feuille sur un tableur pour y inscrire l'ensemble des données (distance, d+, temps de trajet estimé, ...individuels ou cumulés) relatif au différents contrôles.
Quand on s'engage sur un brevet montagnard en vh, on sait que l'on perdra du temps par apport au vd's (surtout moi, je roule pas très rapidement et encore moins dans les montées) et je cherche donc de minimiser les arrêts. Le temps estimé entre deux contrôles me permet alors de calculer l'apport de nourriture qu'il me faudra ainsi que la quantité d'eau.
Etant donné que l'intensité sur un brevet long est basse et sur la base du chiffre d'oxydation maximale d'environs 65 grammes de glucose par heure, je prend en général un apport de 200 kcal par heure ainsi qu'un demi litre d'eau.
QUELS ALIMENTS?
Durant un brevet on ne pourrait manger que les choses suivantes: de l'eau, du sucre, du sel.
Mais quand on roule longtemps, il est évident que l'on doit veiller à ne pas se lasser de sa nourriture. On a quand-même la chance qu'à basse intensité d'effort on peut un tout petit peu plus mettre à contribution notre système digestif que sur p.ex une cyclosportive et donc varier les éléments nutritionnels un peu plus que les trois ci-dessus.
Il n'est pas strictement nécessaire non plus de se garder à une nourriture 'technique' bien que personnellement je trouve la maltodextrine essentielle sur une sortie longue.
Elle se résout dans l'eau, est neutre en gout, apporte des sucres différents et me permet de me nourrir facilement en continu tout en m'hydratant. Je bois quelques gorgées toutes les dix minutes de façon à boire au moins un demi-litre par heure. Ceci m'apporte une source d'énergie très facile à digérer et quand je compare au feeling entre une sortie de 4-5 heures avec malto et sans malto je sens vraiment la différence de pêche.
Il est également bien d'ajouter une pincée de sel par litre d'eau.
A cela j'ajoute du pain de sils avec de la viande séchée des grisons, les deux étant salé Cela me permet d'alterner les gouts
Ensuite de sucreries comme barres énergétiques, fruits secs, etc
Le tout sans omettre de bien faire attention à ne pas dépasser la limite précédemment définie (équivalent de 60 - 70 grammes de glucose par heure)
Les protéines durant une activité sportive ne sont pas nécessaires mais si ça fait plaisir, pourquoi pas.
Les lipides pareils que les protéines, nos réserves ne nécessitent aucunement que l'on en consomme.
PERTE DE POIDS?
Si on veille à avoir une bonne hydratation (la limite d'écoulement de l'estomac est entre 0,75 et 1 l par heure mais moins par temps chaud!), et un apport glucidique correct tout en veillant à ne pas surcharger l'estomac et le système digestif, inexorablement va s'en suivre une perte de poids. Du moment que l'on ne se déshydrate pas celà n'a pas d'importance et veut simplement dire que le stock de lipides a été entamés. Je dirais même plus, sans perte de poids il est probable que l'on se trimballe une quantité de nourriture mal digérée dans le ventre et on peut meme franchir la ligne d'arrivée avec un poids tiptop tout en étant complètement déshydraté!