J'ai lu son article. Son approche est intéressante, je dirais même presque littéraire ou philosophique.
Une question se pose: qui a fabriqué la trace qu'il suit, et selon quels critères ?
Il existe pour le VTT des sites comme AllTrails qui suggèrent des parcours dans une zone ciblée. Ça permet, si les contributeurs ont bon goût, de passer par des endroits sympa qu'on aurait ignorés sinon. Suivre une trace élaborée par quelqu'un d'autre, qui connaît bien le terrain, n'est donc pas si inintéressant que ça...
On en revient un peu au système de guides routiers qui indiquent les endroits sympa (comme les fameuses routes en vert sur les cartes Michelin).
Mais pour nous, en VC, on n'a pas forcément le choix entre single et route asphaltée, sauf erreur de navigation, mais plutôt entre route asphaltée et route asphaltée (des fois un peu moins, mais toujours roulantes). Pousser un vélo chargé dans un chemin, perso, c'est pas mon truc, bien que cela me fût arrivé par négligence... Je pense en particulier à une étape épique en Bulgarie.
Ceci dit, dans certains pays et sur de longues étapes, il me paraît important de disposer d'une trace, que je considère comme un fil conducteur, et pas du tout comme un itinéraire à suivre à tout prix.
Pas besoin de routage si vous traversez le Canada, par exemple: peu de routes goudronnées (dans les Prairies les transversales sont des pistes), et toutes orientées Est-Ouest ou Nord-Sud. S'il fait beau, même pas besoin de boussole, il suffit de regarder la position du soleil et de suivre la bonne direction. Surtout que les intersections peuvent être très éloignées les unes des autres. On a donc le temps de vérifier si on est sur la bonne route...
La trace permet également de ne pas emmener des kilos de cartes si vous voyagez loin. J'avais acheté des cartes papier pour mon voyage en Bulgarie avec BerG et Bertrand Canada, mais je n'ai sorti que la carte à grande échelle de l'Europe, plus pour nous situer par rapport à notre position sur notre parcours que pour choisir un itinéraire.
D'autant que s'il s'agit de suivre un itinéraire, il faut une carte avec une échelle permettant de voir quelque chose (au pire 1/200.000), ce qui représente 20 mètres linéaires de cartes pour un parcours de 2000 km!
Autant dire qu'il serait bête de ne pas utiliser le smartphone, puisqu'il existe, e que souvent on en possède un quand on voyage, n serait-ce que pour rester en contact avec les proches, ou s'informer de la météo, etc...
BerG avait préparé une trace depuis le point de départ, jusqu'à Sofia. Paradoxalement, je trouvais la démarche castratrice, car si on la suivait à la lettre, on n'avait plus aucune latitude de faire autrement que prévu. Se perdre -pas trop longtemps- est quelquefois un plaisir, plaisir de s'inventer une mini-aventure pour reprendre le droit chemin.
À condition que ce ne soit pas à la nuit tombante, ou tombée, et dans une région sinistre. Encore que. Ça fait des évocations excitantes pour les futures récits à la veillée...
A l'époque, nous lui avions fait confiance, Bert et moi, et il nous a sorti une paire de fois de situations où nous ne savions plus où nous étions ni quelle route prendre...
Comme nous avions prévu de nous séparer dans le Grand Balkan, d'une part, et que BerG avait cassé son smartphone, d'une autre, j'ai commencé à me soucier des traces à suivre pour revenir seul à Igoumenitsa en traversant les Rhodopes...
J'avais chargé une version gratuite de VisuGPX; Je me suis rendu compte par la suite qu'on ne pouvait pas avec cette version choisir le type de route/chemin, d'où la photo ci-dessus. La version payante n'est pas dispendieuse (j'ai des lecteurs québecois
) et permet d'écarter les routes non carrossables.
VisuGPX me permet de faire une trace, que je suis ensuite sur AlpineQuest, tout ça sur mon smartphone. Quand je dis "je suis", c'est très relatif. Je suis surtout les pancartes. En Bulgarie et Grèce, ça permet aussi d'apprendre les alphabets cyrillique et grec...
Je suis à peu près. De temps en temps, je vérifie si je suis toujours sur la trace, et si je m'en suis écarté, j'avise la manière de la rejoindre au plus pratique ou au plus pittoresque.
C'est donc un peu un mélange des deux méthodes énoncées par Thierry Crouzet. À l'usage, cela me convient très bien, en laissant la possibilité de se perdre un peu, mais pas trop. En général, mes écarts ne m'ont jamais empêché d'atteindre l'étape prévue.