Voici avec un peu de retard mon compte rendu 24 Heures de l'INSA. C'est
un peu long mais j'ai eu 5 heures de train à tuer au retour...
et puis pour les allergiques à la lecture, le dernier paragraphe suffit!Histoire de situer le contexte: il s'agit pour moi d'un projet un peu fou dans le but de me tester sur de grandes distances et de valider (ou pas) certains points de ma pratique. N'ayant jamais tenté ce type d'épreuve, je ne prévois aucun plan de route et j'ai plusieurs objectifs qui me permettront au final de me dire que je suis pas venu pour rien!:
- Dépasser la barre des 242km (distance la plus longue que j'ai réalisée jusque là)
- Arriver à 300km parce que c'est chiffre rond
- Arriver à 400km c'est aussi un chiffre rond mais ça suppose de pas avoir de gros pépin
- Arriver à 500km parce que ça le fait! Mais là faut pas avoir de pépins du tout et faut pas dormir chose dont je ne suis absolument pas sûr...
Arrivé à l'arrache sur le campus à 11h50, je viens à peine de me garer que la voiture qui se met à coté se révèle être conduite par le second vélocouchiste de l'épreuve! Il s'appelle Alessandro il est sourd et Italien (je l'ai appris après mais ce détail est d'importance car il ne lis que peu le Français sur les lèvres) ce qui ne facilite pas notre communication mais sa femme se charge de faire la traductrice pour les présentations et les questions d'organisation que nous nous posons mutuellement...
« Mais où sont donc les dossards? »
« A la mairie de Villeurbanne »
« Ah et comment on y va? »
« Ben à vélo... »
« Mais c'est par où? »
« Alors là... »Le temps de sortir le vélo et je pars en quête d'un organisateur pour qu'il me guide, au moins pour sortir du campus ou mieux jusqu'à la mairie de Villeurbanne où on doit récupérer les dossards (Alessandro s'est débrouillé pour se le faire ramener par l'organisation). Je tombe alors sur mon autre voisin de parking (par hasard encore un fois), Frédéric avec qui nous filerons au pif à travers les rues de Villeurbanne mais jusqu'à bon port. J'apprendrais en discutant avec lui qu'il est déjà adepte de la longue distance qu'il a à son actif au moins un Paris-Brest-Paris et qu'il a roulé (un bon moment) avec notre championne Barbara lors d'un Bordeaux-Paris... Je situe un peu mieux le niveau du bonhomme à partir de ce moment là
Il me donnera deux précieux conseils:
- Un coup de barre: faut insister et ça finit par passer
- Pour la nuit faut pas traîner pour s'habiller et surtout, il faut « bien » s'habiller.
Juste à titre d'information, il finira 3e de la catégorie « reine » des vélos « normaux en solo » (et oui, les vélos couchés sont Hors Catégorie mais vu que nous étions que deux, difficile de leur en vouloir de ne pas avoir fait de catégorie rien que pour nous!) avec 722km. Une fois le dossard récupéré je retourne sur le campus car je préfère sauter les étapes du prologue dans Villeurbanne (Parade entre la mairie et le Campus) et les discours pour revenir me restaurer avant le départ: une bonne salade de pâtes et une banane. Je pars ensuite pour quelques tours de reconnaissance de la boucle de 2,5km environ. J'ai le temps de constater qu'il y a un dos d'âne assez violent et qu'il y a juste après un virage un peu serré avec une bouche d'égout bien à la corde suivi de la seule portion qui peut se prévaloir du qualificatif de montée. Le revêtement est globalement assez mauvais car à part la ligne droite de chronométrage le reste est souvent rapiécé à la va vite et m'imposera au fil des tours un slalom peu orthodoxe pour m'assurer le minimum de secousses. Le parcours est sinon assez rapide (et avec un bon revêtement il deviendrait très rapide) et ne nécessite pas de freiner sauf à arriver à plus de 35km/h dans le virage après le dos d'âne.
Nous sommes ensuite agglutinés à 13h50, sous la banderole du départ pendant de trop longues minutes avec cette chaleur et allongé sous le soleil, je commençais à avoir les cuisses et les bras qui me brûlaient malgré les deux couches de crème solaire... 14h15, le départ est enfin donné avec un bon quart d'heure de retard. Je m'étais mis à l'arrière du peloton au départ pour éviter de gêner et de me faire gêner. J'avais été rejoint par Alessandro et nous avons donc démarré ensemble (ce qui était bien sympa même si notre conversation était un peu limitée) en évitant les folklo, les coureurs à pieds bref je suis pas vraiment sûr d'avoir fait le bon choix de placement.
Après quelques tours de faufilage les concurrents sont enfin répartis sur la boucle et les dépassements deviennent plus simples. En tête de la course, un groupe est parti très fort (je dirais 40 à 45 de moyenne sur un tour) suivi d'un second groupe un poil en dessous. Pour le fun et après m'être échauffer un peu je prendrais la roue de ce second groupe pour une dizaine de kilomètres et juste le temps de me rendre compte que même si c'est agréable de se laisser glisser à l'abri dans les lignes droites, le rythme de pédalage sur un tour est trop différent et je dois trop freiner/relancer pour considérer ça comme agréable ou envisageable sur un temps plus long: En gros, ils freinent pour les virages et relancent ensuite alors que moi je peux passer les virages bien plus vite pour éviter ces relances que mes genoux ne me pardonnent pas. Au bout de la première heure je sais que je roulerais seul.
La première centaine de kilomètres sera avalée à près de 30km/h de moyenne sans compter les arrêts car je suis obligé de m'arrêter pour me restaurer. N'étant pas encore adepte de la nourriture liquide, et comme je suis trop maladroit pour tenter d'ouvrir les emballages de barre de céréales en pilotant, je n'ai pas d'autre solution que de faire des pauses. La fin d'après midi verra la monotonie rompu par une crevaison juste avant le dos d'âne (j'ai repéré un impact sur la jante sur le bord extérieur entre la piste de freinage et le pneu... ça me laisse perplexe
). Je change la chambre et me fais aborder par un gars de l'atelier des bikers (très sympa d'ailleurs) qui vient me proposer son aide et son matos mais qui repart un peu dépité devant mes 571/23 ETRTO visiblement non référencées dans leur stock! Je remets 5 bars à la pompe à main et termine le tour pour aller chercher la pompe à pied pour arriver à 8,5: Ben ouais faut bien qu'il y ait des avantages à tourner en rond, le gros du matos et de la bouffe reste dans la voiture (déjà que j''étais le seul, hors folklo, à rouler avec porte-bagage et sacoches, j'allais pas non plus les charger à bloc!)
Je crois bien (mais ma mémoire et le manque de repères temporels me trompent peut-être) que c'est à ce moment là qu'Arafolie est arrivé et que nous avons bien papoté avant que je reparte.
Sur les coups de 19h c'est au tour de MissMicke et MiniMicke de venir m'encourager: nouvel arrêt papote, bisous, coups de sonnette pour le bonhomme qui ne comprend pas pourquoi je peux pas l'emmener avec moi sur le vélo pour aller faire un tour et qui dira le soir même au moment du couché: « Moi je faire comme papa, je veux pas dormir! »
Quelques tours plus tard (la nuit devait arriver car la CYO s'était mise en marche automatiquement), je repère la bande réfléchissante d'un pneu en 406 (dans ma tête:
« Tiens: remorque ou vélocouché? ») et à coté un gars qui me hèle... Au tour suivant, je découvre qu'il s'agit d'un autre membre du Forum du General Lee himself et de son non moins illustre pilote, M, venu m'offrir une nouvelle excuse pour m'arrêter et papoter un peu!
Après avoir rouler un peu, je m'arrêterais à nouveau vers 21h pour casser une petite graine: sandwich au jambon et nouvelle banane. Je m'aperçois à ce moment là que j'ai flingué plus de la moitié de mon stock d'eau...
... J'en suis à 170km au compteur.
Je redécolle un peu avant 22h et vers 23h c'est le gros coup de barre: je baisse l'allure, essaye de prendre une roue pour m'aider à me garder concentré tout en bénéficiant de l'abri mais c'est vraiment pas agréable d'être obligé de relancer après avoir été obligé de freiner... Je roule donc seul, en plus, après les alertes des tendons d'Achille et du genou droit (mais que je gère tranquillement avec l'habitude maintenant...), je m'aperçois que je suis en train de me brûler l'intérieur des cuisses à cause des frottements du cuissard...
Je finis par jeter l'éponge à minuit et aux alentours de 200km au compteur (malgré le conseil de Frédéric, j'ai le moral dans les chaussettes et je me demande bien comment je vais faire pour rouler au moins autant que ce que j'ai déjà parcouru. Je sais que je ferais pas 500 mais 400 j'y croyais encore un peu...). Je décide de tester ma solution de repli de secours: dormir dans le coffre du Scenic dont j'avais viré les sièges. L'installation est sommaire voir même un peu inconfortable mais les yeux se ferment à 0h15. Ils se rouvriront tous seuls 20 minutes plus tard et bizarrement, je me sens bien mieux: pas envie de me rendormir alors je grignote une banane et une pâte d'amande et je repars un peu avant 1h du mat', le MP3 sur les zoreilles pour passer le cap du 2h/4h que je redoute. Bien m'en a pris car c'était certainement le meilleur moment de cette épreuve.
J'ai bien roulé, la température n'était pas trop fraîche (mais j'étais habillé chaudement sur les conseils de Frédéric et je ne l'ai pas regretté) et pas trop chaude non plus pour ne pas accentuer la sensation de brûlure au niveau des cuisses. De plus, les groupes de têtes avaient soit ralentis soit rapetissés si bien qu'il est était moins désagréable de se faire doubler (en fait c'est surtout dans les virages que c'était embêtant car trop d'entre eux n'hésitaient pas à couper ma trajectoire alors qu'ils ne m'avaient pas complétement doublé... bref une seule frayeur mais l'avantage d'un circuit en boucle et d'être facilement reconnaissable c'est qu'après ma gueulante, ça s'est beaucoup mieux passé!).
Aux alentours de 3h du mat', je dépasse les 250km, distance inédite pour moi! Voilà déjà une victoire! L'objectif des 300 me semble une formalité alors que celui des 400 me parait désormais tout à fait accessible. Il faut dire qu'à minuit lors de mon coup de barre, quand j'ai vu que j'en étais pas encore à 200 et qu'il faudrait faire de même pour arriver à 400, j'ai eu de gros doutes...
J'avais un peu peur de la fin de nuit vu les commentaires lus ou entendus sur les précédentes éditions et sur les effets de l'alcool sur les spectateurs mais de ce coté là, je dois dire que j'ai été très agréablement surpris de l'organisation. Ils tournaient régulièrement en voiture ou à vélo sur le circuit munis d'un balai pour dégager les débris de verres. Je les ai vu intervenir 2 fois seulement pour une bouteille brisée mais beaucoup plus régulièrement juste pour dégager la route des divers débris qui s'y étaient accumulés: vraiment très sympa de coté là.
Pour les effets sympa de l'alcool, la nuit aura vu les encouragements les plus fervents! Bon faut être honnête, il y a aussi quelques quolibets mais c'est resté très gentillet. J'ai même eu ma petite victoire personnelle pour avoir été me coucher bien après ceux qui auront scandé « fainéant » à chacun de mes passages le samedi!
À 7h du mat' et 350 km au compteur, revoilà Arafolie avec le petit déj! Le saint homme sait comment apprivoiser le rouleur solitaire... Il m'a acheté à coup de pain aux raisins qu'il m'a vendu comme bien gras et bien sucré: pil poil ce qu'il me fallait! Vu qu'il me manquait une vingtaine de tours pour arracher le 400, je me suis pas pressé pour repartir! D'ailleurs à peine reparti, voilà que je m'arrête de nouveau (pour la vidange) et que je tombe sur le petit déj de l'organisation...
Rô faut pas les laisser s'abîmer ces croissants! Bon je fini quand même par repartir...
9h30 c'est au tour de M de m'appâter avec son pain au chocolat... mais je suis fort, je fais encore un tour avant de m'arrêter (ok j'avoue l'avoir vu trop tard et le temps de freiner j'aurais été sous les cellules de chronométrage et c'est pas le bon plan pour s'arrêter et faire demi tour!). 2,5km plus tard et à 1,5 km de l'objectif des 400, je profite donc de ce nouvel arrêt pour profiter un peu de ces rencontres fort agréables pour discuter un peu... enfin près de 2h quand même
Et puis au moment où M décide de repartir, voilà MissMicke et MiniMissMicke qui arrivent pour m'encourager! Une matinée pas efficace coté compteur mais très agréable pour le moral!
Je repartirais donc à midi pour voir le compteur dépasser les 400km et faire 2 tours supplémentaires pour être sûr qu'aux arrondis de kilométrage du système de chronométrage près, je ne sois pas affublé d'un 399km au classement officiel que j'aurais un peu mal pris!
Je redécollerais finalement à une demie heure de la fin, histoire de passer le chrono à 24h et tenter d'apercevoir les autres membres du forum qui seraient postés le long du parcours. En plus, je tiens une forme étonnante (merci les 5h de pause et la crème magique pour les brûlures apportée par MissMicke) et je terminerais façon contre la montre sans me faire doubler par la meute en furie du groupe de tête.
Le bilan en chiffre: 424,89km au compteur (428 officiellement mais j'avoue avoir gratter un tour dans la nuit en passant les cellules et retournant ensuite sur mes pas pour un arrêt technique...), 15h20 de pédalage et donc 27,7 de moyenne roulée (contre 17,7km réelle).
Le bilan machine: RAS, le vélo tourne comme une horloge. Je n'ai utilisé que le plateau intermédiaire et les 6 plus petits pignons. Pour l'éclairage, le couple SON/CYO est d'un confort extraordinaire. Il reste la question des pédales mais c'est en lien avec le chapitre suivant...
Le bilan moteur: J'ai un peu mal aux tendons d'Achille et au genou droit. Pour les tendons, j'ai raccourci la bôme après 8h de course et changé de chaussures: j'ai délaissé les chaussures de routes pour les VTT et cela m'a semblé bénéfique. Pour le genou, je suspecte fortement la faible surface d'appui des pédales SPD qui me permette de pédaler avec le pied droit non pas à plat mais légèrement incliné vers l'extérieur (comme si je marchais en devers). Je vais donc tenter les pédales de route pour avoir une surface d'appui plus importante et moins de jeu cale/pédale. Pour le reste et après une nuit de 14h de sommeil de dimanche à lundi, je me sens étonnement bien musculairement parlant: pas de courbatures, juste une légère sensation de lourdeur dans les cuisses.
Le bilan de mon organisation: Il faut que je repense ma façon de m'alimenter et que je me trouve des sous-vêtements corrects.
Le bilan moral: Il y a eu beaucoup de hauts et qu'un seul bas mais je me demande si ce n'est un passage obligé sur ces distances... Par contre, le jour même je me demandais si je retenterais ce type d'épreuve ou si je ne préférerais pas m'orienter vers de la longue distance type BRM ou diagonales. Tourner en rond n'est quand même pas très excitant. Au départ, j'envisageais cette épreuve comme un test pour les 24h de Sault j'avoue avoir encore quelques doutes mais la perspectives de partager ce moment dans une ambiance comment dire... « différente », devrait finir de me convaincre.
Au final, je suis quand même très content du déroulement de cette épreuve. J'ai pas eu de gros pépins, j'ai appris pas mal de trucs sur moi et ma pratique. J'ai quand même une mention spéciale pour les membres du forum venus nous encourager car rien que pour ça ça valait le coup d'être là! Un très grand merci à eux et à leur petites attentions (photos, petit déj, bonne humeur,...), ça donne vraiment envie de partager ça plus régulièrement.