Le Forum du Vélorizontal, vélo couché et autres véhicules à propulsion humaine Le forum francophone de tous les amateurs de cette pratique cycliste |
|
| décroissance scolaire et culturelle | |
|
+9Daniel à Digne TiBen JC. Samural Fleur Michmich.70 DB2 Lavoieverte el gato 13 participants | |
Auteur | Message |
---|
el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: décroissance scolaire et culturelle Dim 06 Fév 2022, 09:16 | |
| ... fil digressif venant du fil https://velorizontal.1fr1.net/t26847p25-agrement-pour-le-savoir-rouler-dans-lecole-primaire-de-ma-fille#686537 - Lavoieverte a écrit:
- el gato a écrit:
- C'est en effet dans le programme officiel à l'école primaire. C'est chouette, mais, un truc de plus qu'il va falloir caser dans le planning, et sur quoi va-t-on rogner, sur le français probablement, et on s'étonnera que les jeunes aient du mal avec l'orthographe.
Cela ne devrait-il pas pouvoir se faire sur du temps extra-scolaire, encadré par des assos du genre de celles qui animent des vélos-écoles ? Parce que, ok, une sortie à vélo avec la classe, pourquoi pas, mais je vois difficilement les enseignants et les parents se transformer en moniteur de vélo-école, ça ne s'improvise pas. Au nom de la sobriété, à l'encontre du toujours plus et de la croissance perpétuelle, ça me semble préférable au contraire que ce genre de chose se fasse sur le temps scolaire avec l'appui de parents ou autres bénévoles, plutôt qu'en faire une activité parascolaire de plus avec les frais associés et le temps bloqué pour ça.
L'école occupe suffisamment de temps des enfants. À quel point on s'exprime et on rédige correctement en français grâce aux heures de cours de français, c'est difficile à dire. On n'apprend pas à parler avec des cours. On n'a quasiment aucune formation scolaire de droit ni d'économie dans le cursus obligatoire et on doit s'en tirer comme ça. Cela me donne froid dans le dos de lire que l'école est peu utile pour apprendre le français. L'école n'apprend effectivement pas à parler, à l'école élémentaire on apprend à lire et à écrire. Il y a peu de gens qui peuvent se permettre d'enseigner à la maison avec un précepteur ou un parent qui ne travaille pas (les femmes bien évidemment). Non, le contexte familial ne suffit pas, à moins de considérer que l'accroissement des inégalités culturelles entre enfants est hautement souhaitable ou en tant cas, qu'on y est indifférent. Ce libéralisme à l'anglaise (indifférence aux inégalités) est choquant pour la plupart des citoyens français. Sur quoi te bases-tu pour affirmer que l'école occupe suffisamment de temps des enfants au regard du niveau culturel nécessaire ? La décroissance culturelle n'est pas souhaitable, bien au contraire. Et plus on ajoute d'enseignements non élémentaires à l'école, plus on doit réduire le temps consacré aux enseignements essentiels pour lesquels l'école élémentaire a été créée : lire, écrire et compter. Considères-tu que ces compétences ne sont pas essentielles, sachant que si on laisse faire les choses spontanément, la majorité des familles n'aura pas les ressources nécessaires (temps / argent / capacités compétence-pédagogie) pour atteindre le minimum nécessaire. Une nation d'ignares et d'incultes, ce ne serait pas grave... et de plus aucune chance que cela serve les valeurs de sobriété, car si l'école ne se charge pas de l'éducation, ce sont les entreprises qui le feront, encore plus que maintenant. Et pour transmettre des valeurs de croissance perpétuelle, ce serait effectivement l'idéal, sur lequel bavent forcément nos gentils gouvernants. "On n'a quasiment aucune formation scolaire de droit ni d'économie dans le cursus obligatoire et on doit s'en tirer comme ça." Hé bien justement, tu auras remarqué combien les politiques dans leur immense majorité des domaines du droit / économie, s'y entendent parfaitement pour débiter des balivernes que la plupart des citoyens avalent sans sourciller justement parce qu'ils n'ont qu'un très faible niveau culturel dans ces domaines. Il n'y a vraiment pas de quoi se dire que c'est très bien ainsi. C'est justement une des raisons pour lesquelles la pseudo-démocratie est facile à manipuler. Par ailleurs, rogner sur le temps hors scolaire pour faire ces formations vélo, c'est rogner du temps sur la consommation de loisir de masse. Les journées dans les parcs d'attraction, c'est foncièrement anti-écologique comme activité. Des parkings de bagnoles à perte de vue, des loisirs où règne une débauche de consommation électrique, de la junk food et du plastique... Et donc, laisser le temps scolaire pour les apprentissages essentiels, et faire de la formation vélo hors temps scolaire, pourrait favoriser des loisirs beaucoup plus sobres. Sinon l'impression que me laissent tes aspirations, c'est la sensation d'une écologie libérale et régressiste. Dont les adjectifs collent hélas parfaitement à l'air du temps. |
| | | Lavoieverte Posteur d'argent
Messages : 504 Âge : 50 Localisation : Annecy VPH : Un Quest carbon, un VAE de ville Cannondale, un VTT Date d'inscription : 20/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 06 Fév 2022, 18:24 | |
| Bonjour ! Je ne dis pas que l'école est inutile, je pense juste que si les enfants y passaient moitié moins de temps, on verrait bien peu de différence à la fin. Vois cet excellent film en espagnol avec sous-titres disponibles en Français, je te le mets au passage sur ce sujet du temps à l'école : https://youtu.be/-1Y9OqSJKCc?t=702 - La Educación Prohibida a écrit:
En Argentine, actuellement, la majorité des enfants se disent: Quelle flemme, c'est lundi, je dois aller à l’école ! Mais le pire, c'est que la majorité des enseignants argentins se disent exactement la même chose.
Je ne veux pas qu'il perde son temps à l'école, je ne veux pas qu'il y passe de mauvais moments.
Actuellement, un enfant de 8 ans passe plus de temps à l'école qu'un étudiant à la fac. cela n'a aucun sens, il n'y pas tant de connaissances que ça à apprendre à l'école
L'école n'est même pas un lieu de formation. C'est une garderie, ou comme j'aime dire: un méga parking d'enfants.
Je pense que ce sont des prisons. Je pense que c'est une horreur d'avoir à y enfermer des enfants.
Je veux que l'école soit pour lui un espace de développement personnel, et non pas un lieu où il est dompté, en vue de son entrée dans le secondaire, puis en fac et ensuite dans le monde du travail. Et ensuite: pour quoi encore ? Cette représentation que chaque année d'école, chaque mois, chaque semaine, chaque heure est cruciale à un enfant ou un adolescent et que les manquer laisserait des carences fatales et irrattrapables dans l'édifice de sa formation, c'est une représentation largement partagée, un mythe de notre époque, mais bien naïf et peu vérifié. D'autres passages du film montrent comment on perpétue un mode de scolarisation qui s'est fixé au XIXè siècle, voire fin XVIIIe, sous Napoléon ou Catherine II de Russie. Ton argument des inégalités revient tout le temps dans ce débat : en gros, malgré de gros moyens pour prolonger la scolarité de tout le monde sur le modèle de la scolarité des enfants de bourgeois au XIXè siècle (qui n'en étaient pas spécialement heureux), bien qu'il y ait réellement de la mobilité sociale, on observe que ces inégalités perdurent, et on en tire argument pour en faire toujours plus, à l'instar de n'importe quel marchand de voiture veut vendre au fil des années des voitures de plus en plus équipées, lourdes et puissantes. Cet argument récurrent de presque tous les débats de l'éducation scolaire, y compris de personnes de points de vue opposés (méthodes traditionnelles ou modernes...) est "oui les élèves favorisés arrivent à s'en tirer avec votre truc, mais ça ne marche pas avec les élèves défavorisés donc ça aggrave les inégalités". À croire qu'ils sont magiques, ces élèves favorisés pour se tirer de tout et son contraire avec avantage (et c'est inexact). Mais à la limite, on pourrait l'entendre et en tirer une autre orientation de mesures : plutôt que d'en rajouter toujours plus pour tout le monde dans l'espoir de résoudre les inégalités : scolarité qui s'allonge, obligatoire ou pas, obligation scolaire à 3 ans assez récemment (dans l'idée qu'on a des mauvais élèves à tel niveau parce qu'on n'a pas assez fait ou pas bien fait dans les niveaux précédents, et l'illusion qu'en allant chercher presque à la source, ça y est on va y arriver) Donc plutôt que d'en ajouter pour tout le monde, on pourrait alléger les moyens pour les élèves favorisés ! Proposer aux familles qui peuvent l'école par demi-journée au primaire, et à partir de la 4ème, proposer l'alternance aux bons élèves : une semaine sur deux au collège à condition de justifier d'une activité qui participe à leur éducation l'autre semaine ! Puisqu'ils se débrouillent de tout, ça n'aurait pas de conséquence et on ferait des économies ! (Enfin on augmenterait un petit peu moins la dette qu'on va leur léguer de toute façon). |
| | | DB2 Accro du forum
Messages : 1323 Âge : 62 Localisation : L'Isle sur la Sorgue VPH : Le beau black (VTX musculaire, ICE) Le voyageur (Ti-Fly AE solaire, Azub) Date d'inscription : 28/07/2020
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 06 Fév 2022, 22:13 | |
| "On" peut proposer tout un tas de choses toutes plus belles les unes que les autres ... mais si tu ne donnes pas des moyens à l'école POUR TOUS, ça sera ceux qui ont déjà bien compris l'intéret des meilleures filières, des meilleures diplômes pour avoir (en plus d'un relationnel efficace) toutes les chances du meilleur emploi plus tard. Dans un monde idéal, on pourrait espérer plein de choses mais dans le notre, qui n'est pas idéal, il faut juste se battre pour que les inégalités ne continuent pas à se creuser ... |
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Mer 09 Fév 2022, 22:35 | |
| Lavoieverte : l'utopie a du bon, cela permet de réfléchir et c'est déjà bien. - Lavoieverte a écrit:
- L'école n'est même pas un lieu de formation.
C'est une garderie, ou comme j'aime dire: un méga parking d'enfants.
Je pense que ce sont des prisons. Je pense que c'est une horreur d'avoir à y enfermer des enfants. Ton post de ton très bonnardellien me fait immanquablement penser à un vieux pote que j'ai perdu de vue pour désaccord intellectuel. Ceci devrait donc t"intéresser : https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2016-1-page-176.htm A nuancer car une extension de la pensée de l'individu allait à l'autonomie sexuelle des enfants entendue comme la liberté pour un adulte de profiter de la liberté des enfants. René Schérer, auquel mon pote Bonnardel aimait faire référence, avait ces idées très post-68 qui ont dérapé en apologie de la pédophilie dans les années 70 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Sch%C3%A9rer L'école pour autant coercitive qu'elle soit, n'est pas la prison panoptique "à la Jeremy Bentham" de la Petite Roquette du 19ème siècle. https://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2017/09/11/26010-20170911ARTFIG00274-la-petite-roquette-les-effrayantes-conditions-de-detention-des-enfants-decrites-par-le-figaro.php Sur le fond, l'émancipation des enfants ne se décrète pas, elle dépend aussi beaucoup de la maturité des individus. - Lavoieverte a écrit:
- Donc plutôt que d'en ajouter pour tout le monde, on pourrait alléger les moyens pour les élèves favorisés ! Proposer aux familles qui peuvent l'école par demi-journée au primaire, et à partir de la 4ème, proposer l'alternance aux bons élèves : une semaine sur deux au collège à condition de justifier d'une activité qui participe à leur éducation l'autre semaine !
Puisqu'ils se débrouillent de tout, ça n'aurait pas de conséquence et on ferait des économies ! (Enfin on augmenterait un petit peu moins la dette qu'on va leur léguer de toute façon). Des élèves à temps partiel à l'école, c'est exactement ce qu'on vit depuis des mois avec les exclusions covid. Je ne crois pas qu'il existe un seul enseignant satisfait de cette situation. Pédagogiquement c'est un fabuleux bazar à gérer, même en pédagogie Montessori où chacun avance à son propre rythme |
| | | Michmich.70 Accro du forum
Messages : 1698 Âge : 68 Localisation : Haute Saône quelque part entre Vesoul et Belfort Date d'inscription : 26/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 05:59 | |
| Sujet très très intéressant et pertinent que je vais suivre avec intérêt... |
| | | Fleur Accro du forum
Messages : 9596 VPH : Toxy ZR, tandem Hase Pino, Brompton, Moulton Speed Date d'inscription : 26/06/2009
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 06:53 | |
| L'ignorance du peuple a toujours servis les dirigeants, cela leur permet de plus facilement manipuler les masses, leur faire avaler n'importe quelle connerie.
Les dirigeants ont donc toujours aimer réserver l'éducation à une "élite" = leurs aficionados.
Il en est d'ailleurs de même pour les machos qui désirent réduire au minimum l'accès à l'éducation des femmes.
Pour ce qui est du temps passé à l'école soi-disant en augmentation du fait d'études plus longues, on a tendance à oublier que si le nombre d'année d'éducation obligatoire a augmenté, le temps passé à l'école par semaine a lui nettement baissé, il n'y a pas si longtemps, les enfants allaient à l'école non seulement le mercredi matin mais aussi le samedi matin et avant cela le mercredi toute la journée ! |
| | | Samural Accro du forum
Messages : 6731 Âge : 56 Localisation : Namur, Belgique VPH : WAW 169 assisté, ZOX 26 Low, Dahon Jetstream P8, Grand-Bi 54" SHW, Vélocipède Michaux 1868, biporteur Avalon Opa Export Date d'inscription : 12/10/2008
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 07:17 | |
| Qu'en est-il de l'Allemagne, où à l'école primaire, les enfants ne vont à l'école que le matin (de 8h à 13h). L’après-midi, les élèves peuvent avoir de l’aide aux devoirs, du soutien scolaire ou des activités non obligatoires. Source
Leur langue n'est pas moins riche que la nôtre et il me semble qu'économiquement, ils ne se débrouillent pas trop mal.
En Suède, les élèves de primaires ont également beaucoup moins d'heures de cours qu'en France (voir ici).
|
| | | JC. Posteur d'argent
Messages : 500 Âge : 52 Localisation : Quelque part tout en haut... VPH : Catrike 700 "modified" Date d'inscription : 28/04/2015
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 13:08 | |
| Pour l'Allemagne, l'organisation est différente. Il n'y a pas d'uniformité au-delà de principes généraux. Les durées d'enseignements varient d'un Land à l'autre. L'après-midi n'est pas libre mais consacrée à des enseignements appelés non-fondamentaux en France. Les journées sont moins longues mais pas tant que cela. Et en contre-partie, la période scolaire est beaucoup plus longue qu'en France (même si, là aussi, cela varie beaucoup d'un Land à l'autre). Le système allemand favorise également l'apparition d'école privée qui viennent compléter la journée d'école normale (mais comme cela n'a pas le même nom, ce n'est pas comptabilisé par les journalistes français). La Kindergarten est le chantre de l'inégalité sociale. Le système ne tient que parce que, dans la majorité des cas, un seul des deux parents travaille (le modèle de la mère au foyer est celui défendu par nombre d'allemands) ou que les grands-parents sont là corvéables à merci. Et là aussi, nombre de parents en sont réduits à créer des associations qui viennent pallier les carences du système allemand (quand l'Eglise ne le fait pas déjà au départ), lequel vu de l'extérieur parait toujours merveilleux. Ton lien Wikipedia n'est pas vécu de l'intérieur (ma belle famille est allemande, mes beaux-parents étant tous les deux d'anciens enseignants du secondaire, et mon meilleur ami vit à Berlin depuis quelques décennies avec un enfant qui a fait toute sa scolarité jusqu'à maintenant là-bas), je peux t'assurer que derrière la théorie évoquée, la réalité est plus complexe et moins rutilante. La sélection est inscrite dans les gènes du système allemand (Hauptschule et Realschule) avec des passerelles qui ne sont souvent que théoriques. L'ascenseur social ne fonctionne quasi pas en Allemagne, contrairement à la France (j'en suis un exemple concret et je connais plein de personnes dans mon cas, enfants d'ouvriers qui sont aujourd'hui cadres sup dans le secteur public ou privé). Une différence de taille cependant (en faveur de l'Allemagne), là-bas, le travail paie et on peut économiquement réussir plus facilement mais il y a moins de protection, l'Allemagne sait juste mieux cacher ses pauvres cf. tous ceux qui vivent avec leurs minis-job et autres statuts d'étudiants à vie (comme une bonne idée au départ peut vite se transformer en impasse). L'approche de l'enseignement est plus pragmatique en Allemagne. Le système a double vitesses permet cela plus facilement avec un écart intellectuel plus réduit entre élèves d'une même classe. D'où le fait que les erreurs d'aiguillages (nombreuses) sont plus difficiles à rattraper quand il s'agit de passer du niveau le plus faible au plus élevé.
Dernière édition par JC. le Ven 11 Fév 2022, 12:56, édité 1 fois |
| | | Samural Accro du forum
Messages : 6731 Âge : 56 Localisation : Namur, Belgique VPH : WAW 169 assisté, ZOX 26 Low, Dahon Jetstream P8, Grand-Bi 54" SHW, Vélocipède Michaux 1868, biporteur Avalon Opa Export Date d'inscription : 12/10/2008
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 14:05 | |
| |
| | | TiBen Accro du forum
Messages : 2388 Âge : 34 Localisation : Grenoble et alentours VPH : Alleweder A2 "Stitch" Date d'inscription : 15/10/2018
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 14:32 | |
| Comme quoi le dicton: "L'herbe est toujours plus vert dans le pré d'à côté" est toujours d'actualité! |
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 20:45 | |
| Merci JC. Je n'avais pas le temps de répondre sur l'Allemagne mais j'ai lu ton post avec plaisir. Mettre les pendules à l'heure et tordre le cou aux phantasmes que peut susciter le système scolaire allemand, c'est une mesure de salubrité mentale. Il y a une chose mentionnée par Wikipedia que j'ignorais. Pas de cantine dans les écoles, tu confirmes JC. ?
J'ai vécu et travaillé en Allemagne mais pour rien au monde je n'aurais enfanté là-bas. J'adore les teutons et la proximité avec la langue de Goethe, mais la mentalité de ce pays est une horreur patriarcale. Il y a 20 ans, les statistiques montraient que 40% des femmes diplômées n'avaient pas d'enfant. Kinder oder Karriere, boire ou conduire, il faut choisir. Au vu du faible taux de natalité, les allemandes, elles choisissent. Quant à celles qui enfantent et qui travaillent, la "pause-bébé" requise dure 3 ans. 3 ans écarté du marché du travail... inutile de dire que quand elles en sortent, elles sont hors-jeu, ne reste plus que les petits jobs de merde. A l'époque où j'y étais, le chancelier Gerhard Schröder faisait passer les lois Hartz IV et les jobs à un euro. Le genre de truc parfait pour les gonzesses.
Une année, je m'étais inscrite à un congrès des femmes dans la science et la technique. Elles étaient tellement marginales là-bas qu'elles avaient besoin de se réunir en congrès.
Mon chef n+1, connard fini, m'avait expliqué tranquillement : "ma femme est ingénieure mais elle n'a pas pu exercer son métier parce qu'elle garde les enfants quand ils sont malades." Evidemment je n'ai rien répondu, j'avais juste envie de lui balancer "et toi père peinard, t'as qu'à les garder les mômes, quand ils sont malades !!". Des claques !! Je lui aurais collé des claques !! J'en éprouve encore un dégoût prononcé. Il avait sans doute sincèrement oublié qu'il parlait à une petite française équipée d'un utérus susceptible de fonctionner un jour ou l'autre.
J'avais rencontré pendant que je bossais sur des projets à subventions sur fonds européens, une sociologue allemande qui s'était fait sa "niche écologique" dans le milieu du photovoltaïque. Elle a fini par faire un môme, mais avait tellement dû retarder l'échéance que la grossesse s'est mal passée en raison de son âge avancé, elle a dû avoir des arrêts-maladie avant l'heure.
Là-bas en prenant des cours d'allemand, j'ai rencontré Bahareh, une iranienne mariée à un allemand, ils s'étaient rencontrés en France pendant leurs études, elle venait d'une famille qui avait expatrié ses enfants pour les protéger du régime de Khomeiny, notamment les fils pour qu'ils ne soient pas enrôlés dans l'armée pour la guerre Iran-Irak.
Bahareh avait un tout jeune bébé lorsque j'ai fait sa connaissance ; elle m'expliquait qu'elle allait avec sa fille à un genre de cours de gymnastique pour bébés, et qu'elle était frappée par le fait que les mères allemandes avaient un esprit de compétition terrible, pour savoir quel bébé rampait le mieux, ou lequel se tenait assis le premier, etc.
Les allemandes de l'Est ont beaucoup perdu lors de la réunification. Adieu les crèches d'Allemagne de l'Est.
L'astuce de l'éducation des enfants dans ce contexte ? Emmanuel Todd a donné la recette des structures familiales de type autoritaire / inégalitaire il y a bien longtemps. Typiquement comme le cas de mon chef n+1 dont la femme ingénieure a sacrifié son activité professionnelle. Les structures familiales autoritaires de ce genre produisent un niveau éducatif élevé. C'est le niveau éducatif élevé des femmes qui assure le bon niveau éducatif des enfants, mais les femmes y ont un statut social inférieur.
Bref, le modèle allemand, ne fait pas très envie. Réduire le temps scolaire chez nous. Okay, j'veux bien. Et qui occupe les enfants avec moultes activités pédagogiques pendant que je taffe ???
Dernière édition par el gato le Ven 11 Fév 2022, 06:51, édité 1 fois |
| | | Lavoieverte Posteur d'argent
Messages : 504 Âge : 50 Localisation : Annecy VPH : Un Quest carbon, un VAE de ville Cannondale, un VTT Date d'inscription : 20/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Jeu 10 Fév 2022, 23:12 | |
| - el gato a écrit:
Ton post de ton très bonnardellien me fait immanquablement penser à un vieux pote que j'ai perdu de vue pour désaccord intellectuel. Ceci devrait donc t"intéresser : https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2016-1-page-176.htm
A nuancer car une extension de la pensée de l'individu allait à l'autonomie sexuelle des enfants entendue comme la liberté pour un adulte de profiter de la liberté des enfants. J'ai lu Bonnardel. Alors tu le connais ? "une extension de la pensée de l'individu" laisse entendre qu'il parle lui même en substance de "la liberté pour un adulte de profiter de la liberté des enfants", je n'ai pas lu ça. Mais cela dit, il est trop à gauche pour moi... Il faudrait que je le relise pour mieux en parler mais bon. - el gato a écrit:
L'école pour autant coercitive qu'elle soit, n'est pas la prison panoptique "à la Jeremy Bentham" de la Petite Roquette du 19ème siècle. https://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2017/09/11/26010-20170911ARTFIG00274-la-petite-roquette-les-effrayantes-conditions-de-detention-des-enfants-decrites-par-le-figaro.php Certainement, je ne suis pas extrémiste pour dire cela, mais l'entrée en matière de ce film La Educación Prohibida a l'avantage de bousculer un peu les lieux communs sur l'école indiscutable, incriticable. - el gato a écrit:
Sur le fond, l'émancipation des enfants ne se décrète pas, elle dépend aussi beaucoup de la maturité des individus. Tout-à-fait, il ne s'agit pas de faire des enfants et adolescents des petits adultes, pour moi l'approche intéressante en la matière serait anthropologique. Quoiqu'on en dise à base de certains clichés sur le Moyen Âge par exemple, et malgré de grandes différences culturelles, je ne crois pas qu'il y ait des sociétés où on ne perçoive pas les enfants comme des enfants. - el gato a écrit:
- Lavoieverte a écrit:
- Donc plutôt que d'en ajouter pour tout le monde, on pourrait alléger les moyens pour les élèves favorisés ! Proposer aux familles qui peuvent l'école par demi-journée au primaire, et à partir de la 4ème, proposer l'alternance aux bons élèves : une semaine sur deux au collège à condition de justifier d'une activité qui participe à leur éducation l'autre semaine !
Puisqu'ils se débrouillent de tout, ça n'aurait pas de conséquence et on ferait des économies ! (Enfin on augmenterait un petit peu moins la dette qu'on va leur léguer de toute façon). Des élèves à temps partiel à l'école, c'est exactement ce qu'on vit depuis des mois avec les exclusions covid. Je ne crois pas qu'il existe un seul enseignant satisfait de cette situation. Pédagogiquement c'est un fabuleux bazar à gérer, même en pédagogie Montessori où chacun avance à son propre rythme Quand on dit ça, on n'a encore en rien commencé à montrer que ça se traduit par des lacunes de développement et d'apprentissage en proportion des heures manquées et du désordre perçu par les enseignants (ou aussi par les parents) par rapport à l'ordre habituel qui paraissait intangible. Dans notre société on considère la fréquentation de l'école un peu de la même façon qu'une part des catholiques considère le fait d'aller à la messe. C'est l'observance qui est importante, mais on ne va pas trop gratter plus loin et se demander si en plus on écoute ou si on en retient quelque-chose. On s'agite et on s'inquiète beaucoup si des élèves manquent l'école quelques temps, c'est comme une faute à rattraper. Par contre, qu'ils aient des périodes, même assez longues où les apprentissages qu'ils sont censés faire soient très entravés par une période de rejet, une mauvaise entente avec un prof ou autre-chose, là on considère que c'est comme ça, qu'il n'y a pas tellement matière à se poser plus de questions que ça et encore moins à étudier d'autres options. Comme le faisait remarquer un célèbre pédagogue, dans le discours commun et les médias, une rentrée réussie par exemple, c'est juste une rentrée où il y a un enseignant devant chaque classe. Ce qu'ils en font, si ça marche bien ou pas n'a pas l'air d'être un sujet sur lequel il y aurait lieu de s'attarder. - Fleur a écrit:
- L'ignorance du peuple a toujours servis les dirigeants, cela leur permet de plus facilement manipuler les masses, leur faire avaler n'importe quelle connerie.
Sans doute, mais ça ne montre pas qu'il soit incontournable de passer autant de temps à l'école pour ne pas être ignorant. Il y a bien une époque ou il était communément admis qu'il fût bon pour les enfants d'être transportés nouveaux-nés pour être confiés à une nourrice à la campagne, avant d'être rendus à leur mère deux ou trois ans plus tard. Peut-être que l'école n'est pas aussi violente que ça, mais il se peut aussi que les idées reçues qu'on a sur ses bénéfices, et surtout la rigidité de l'idée qu'on se fait de l'organisation qu'elle doit avoir, soient elles aussi mal fondées. - Fleur a écrit:
Pour ce qui est du temps passé à l'école soi-disant en augmentation du fait d'études plus longues, on a tendance à oublier que si le nombre d'année d'éducation obligatoire a augmenté, le temps passé à l'école par semaine a lui nettement baissé, il n'y a pas si longtemps, les enfants allaient à l'école non seulement le mercredi matin mais aussi le samedi matin et avant cela le mercredi toute la journée ! Ça m'a l'air très approximatif et inexact comme affirmation. Si tu parles du temps où le mercredi était le jeudi, ben voilà effectivement ou travaillait le mercredi toute la journée. Et les vacances d'été étaient beaucoup plus longues. - el gato a écrit:
Bref, le modèle allemand, ne fait pas très envie. Réduire le temps scolaire chez nous. Okay, j'veux bien. Et qui occupe les enfants avec moultes activités pédagogiques pendant que je taffe ??? Ben par exemple les adolescents pendant leur semaine d'alternance où ils ne sont pas en classe ! Pas seuls en responsabilité hein, plutôt comme assistants d'adultes professionnels. Une version modernisée de ce qui s'est fait pendant des siècles en gros, quand les enfants et adolescents avaient un rôle, participaient à l'économie au moins domestique, tout en étant en formation et pas laissés à eux-mêmes. Si certains de ces adolescents préfèrent la compagnie des vieux, il parait qu'on manque de temps humain dans les maisons de retraite. |
| | | JC. Posteur d'argent
Messages : 500 Âge : 52 Localisation : Quelque part tout en haut... VPH : Catrike 700 "modified" Date d'inscription : 28/04/2015
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Ven 11 Fév 2022, 13:16 | |
| @el gato : pas de cantine, sauf très rares exceptions (et bien souvent, si exception il y a, celle-ci est due à une initiative de parents sous forme d'une association). La règle, c'est repas froid tiré du sac (pas de frigo, non plus).
Pour l'Allemagne de l'Est, oui et non. Là-aussi, la réalité est un poil différente de la théorie. Faire des études ne relevait pas toujours du seul choix de la personne. L'une des sanctions les plus courantes pour les familles des fuyards (à l'Ouest ndlr) était l'orientation forcée vers une filière courte avec interdiction de faire des études. Plusieurs de nos ami(e)s sont passé(e)s par là. Un ami (aujourd'hui enseignant à l'École Normale Supérieure de Lyon, chercheur, auteur de plusieurs ouvrages, et hyperpolyglotte) avait le malheur d'avoir un cousin qui était "lâchement" parti à l'Ouest. Le seul horizon professionnel qui lui était autorisé par la RDA était de devenir chaudronnier ; il a dû attendre la chute du mur de Berlin pour pouvoir se réfugier à l'Ouest et entamer de brillantes études. Une autre amie a due rentrer dans un service "administratif" du régime pour pouvoir avoir le droit de faire les études de gestion qu'elle souhaitait faire. Un jour, elle a osée émettre une observation orale par rapport à cet enrôlement forcé ; réponse immédiate à son encontre, radiation des listes des étudiants avec intégration dans une chaîne de production d'une usine deux jours après. Elle ne doit son salut, elle aussi, qu'à la chute du mur. Et des anecdotes aussi tristes, j'en ai des dizaines (pour une autre amie, ses parents ont dû choisir laquelle de leurs filles auraient le droit de faire des études, les deux autres devant aller travailler à l'usine,...). En revanche, personne n'était au chômage. Les magasins étaient "vides" pour (presque) tout le monde sans distinction. Il n'y avait pas d'insécurité. Tout le monde avait un toit,... |
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Ven 11 Fév 2022, 20:35 | |
| @ Lavoieverte J'ai fait la connaissance d'Yves Bonnardel environ un an après mon arrivée à Lyon en 1993, par les anti-bagnoles. Yves avait été précurseur dans le domaine, avec quelques autres, en fondant le ROB rassemblement des opposants à la bagnole, au début des années 90. Quand je l'ai connu en 1994, il avait un pied dans le RVV regroupement pour une ville sans voitures, et un pied dans l'antispécisme (les cahiers antispécistes), donc on s'est côtoyé par du collage d'affiches, du massicotage de tracts, de l'agrafage de brochures, et des bouffes entre potes. C'est parce que je le connais personnellement que je sais qu'il a eu quelques inclinations sur lesquelles il aurait dû s'interroger, au lieu de broder des élucubrations fumeuses pour justifier des égarements, et c'est la raison pour laquelle j'ai quelque méfiance envers les grandes théories sur la liberté des enfants lorsqu'elles viennent d'Yves Bonnardel. D'autant qu'un grand combat de sa vie, c'est la lutte contre LES dominations. Domination des blancs sur les foncés, des hommes sur les femmes, des puissants sur les faibles, des bagnoles sur les cyclistes, des adultes sur les enfants... Or il existe une inégalité de fait entre les adultes et les enfants, assez énorme, qu'Yves semble ne pas voir ou feint de ne pas voir quand le concept s'énonce : - Citation :
Quel type de régime se caractériserait par l’imposition d’horaires pour manger, dormir et travailler, par le contrôle de ses fréquentations et de son emploi du temps, par l’impossibilité de saisir la justice, par l’interdiction de conduire un véhicule, par l’interdiction de voter et d’être représenté politiquement, par l’obligation de demander la permission pour tout et n’importe quoi – aller aux toilettes, parler, se taire – par l’impossibilité sans accord d’une tierce personne de sortir de chez soi, par l’obligation d’habiter à tel endroit avec telles personnes plutôt que dans tel autre avec telles autres, par l’interdiction d’avoir une indépendance économique et donc de pouvoir subvenir à ses propres besoins ? L'éléphant au milieu du salon, c'est la dépendance et l'autonomie, en ce sens que les enfants jusqu'à un certain âge, n'ont pas la capacité de subvenir seul à leurs besoins, du moins dans nos sociétés sophistiquées. C'était certainement plus facile dans la situation des enfants de paysans directement confrontés aux ressources primaires. Tous les mammifères sont sur ce schéma de dépendance à la naissance, à la différence que le bébé humain, qui naît "pas fini" ou du moins "bien moins fini que les autres mammifères" (s'il naissait au même stade de développement que les autres mammifères, environ 9 mois plus tard, sa tête ne passerait plus dans le bassin de la mère), est très dépendant à la naissance et pendant de longues années, après quelques mois quasiment larvaires que n'expérimentent pas les autres mammifères (sauf les marsupiaux, mais dans ce cas particulier la poche est quasiment un utérus externe). La domination des adultes sur les enfants est donc flagrante, et, de fait, jusqu'à un âge avancé. Ceci biaise grandement le rapport de force. D'un autre côté, la capacité des enfants à prendre leur place dépend aussi de la façon dont on les traite. Si on leur explique les choses sans les traiter comme des inférieurs, il me semble qu'ils prennent mieux leur place en tant qu'individu.
Dernière édition par el gato le Sam 12 Fév 2022, 09:46, édité 1 fois |
| | | Daniel à Digne Posteur d'or
Messages : 636 Âge : 79 Localisation : Digne les Bains VPH : Catrike Speed bafang Date d'inscription : 07/03/2007
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Sam 12 Fév 2022, 09:05 | |
| Un débat complètement hors de propos dans ce forum "vélo couché" mais très intéressant et suivi jusqu'à maintenant avec suffisamment de retenue pour rester lisible. Il me vient une réflexion, un facteur d'inégalité difficile à corriger et qui touche beaucoup d'enfants je veux dire "l'amour" . ça me parait déterminant dans le développement de la personnalité. |
| | | Lavoieverte Posteur d'argent
Messages : 504 Âge : 50 Localisation : Annecy VPH : Un Quest carbon, un VAE de ville Cannondale, un VTT Date d'inscription : 20/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Sam 12 Fév 2022, 10:12 | |
| - el gato a écrit:
Tous les mammifères sont sur ce schéma de dépendance à la naissance, à la différence que le bébé humain, qui naît "pas fini" ou du moins "bien moins fini que les autres mammifères" (s'il naissait au même stade de développement que les autres mammifères, environ 9 mois plus tard, sa tête ne passerait plus dans le bassin de la mère), est très dépendant à la naissance et pendant de longues années, après quelques mois quasiment larvaires que n'expérimentent pas les autres mammifères (sauf les marsupiaux, mais dans ce cas particulier la poche est quasiment un utérus externe).
La domination des adultes sur les adultes est donc flagrante, et, de fait, jusqu'à un âge avancé. Ceci biaise grandement le rapport de force. Je n'ai pas compris l'enchainement, ou bien tu voulais dire "La domination des adultes sur les enfants" ? Mais en effet, pousser cet angle de la domination mène à des impasses. La dépendance des enfants n'est seulement matérielle, sinon quelques allocations ou services à domiciles comme pour les personnes âgées pourraient y répondre, elle a des éléments psychologiques. Il y a une psychologie qui dépend de l'âge, c'est sans doute une banalité de le dire. Des enfants de 7 ou 8 ans dans un endroit qu'ils ne connaissent pas se collent à leur parents, ont l'air l'avoir peur de s'en écarter de plus de quelques mètres. À 12 ans, on peut déjà les voir suivre leurs parents un peu en retrait, avec un éventuellement un air ennuyé, ils ont déjà changé (c'est pas qu'ils n'ont plus besoin d'eux hein !) Quand tu vois une poule élever ses poussins, c'est autant elle qui se préoccupe d'eux, qui les rassemble que les poussins qui s'efforcent de la suivre... Jusqu'à un certain âge. Ayant eu des poules, j'ai vu cette étape où les liens entre les poussins et la mère poule se distendent. À votre avis, est-ce que c'est la poule ou les poussins qui tendent à abandonner l'autre en premier ? Eh bien j'ai vu les deux... Des poussins ayant grandi qui allaient de leur côté tandis que la poule qui avait l'air un peu perdu essayait de continuer à les rassembler et à les mener, comme des poussins qui suivaient encore leur mère tandis que celle-ci commençait à les repousser, genre maintenant ça suffit, vous vous débrouillez. Comme chez les humains je crois ! En fait, c'est souvent le fait de pousser un principe à l'extrême qui mène à des bêtises. Cette idée de domination, comme à l'inverse les principes d'éducation du XIXè début XXè siècle comme quoi toute liberté des enfants et adolescents était dangereuse, qu'il fallait les contrôler autant que possible pour assurer leur moralité, que l'obéissance était la vertu capitale. Philippe Meirieu a dit plusieurs fois que l'éducation est une affaire de tension indépassable (qu'il faut assumer) entre principes opposés : autonomie/assistance, liberté/direction, curiosité spontanée/transmission d'un contenu choisi par l'enseignant ou les programmes, etc. Il faut bien faire du "en même temps", comme on dit en politique ! Maintenant, les principes contemporains concernant l'éducation (scolaire en particulier) n'ont plus la dureté de ceux d'il y a 100 ans, mais ils en ont gardé, ils y ont pioché beaucoup de choses, et pas forcément pour le meilleur. Il y a beaucoup de principes d'organisation qui n'ont pas bougé d'un poil. Le "progrès" a consisté à étendre le modèle des lycées militaires ou religieux des bourgeois du XIXè siècle à tout le monde. L'enseignant a toujours la responsabilité de tout : les élèves ont très peu de marge de choix mais c'est aussi très rare qu'on leur confie des petites responsabilités et services qui s'intégreraient dans le fonctionnement. Et quand on atteint l'âge du collège (par exemple, mais ça se décline aussi bien avant qu'après ) on aspire à se voir confier un rôle, à avoir une marge de choix. Meirieu disait que ça pouvait commencer par une consigne qui dise "vous ferez l'exercice 18 OU l'exercice 32 du chapitre 4". Mais dans une sorte de convergence, de mix entre l'éducation très directive voire totalitaire des internats d'il y a un siècle et des idées de protection de l'enfance poussées aux limites, il est devenu communément admis que les enfants et adolescents ne devaient se préoccuper que de leur propre éducation, et à plein temps quasi jusqu'à 20/25 ans, à l'exclusion de tout rôle social, toute responsabilité même dans un petit périmètre et à plus forte raison toute activité productive. C'est très coûteux, c'est déséquilibré (de faire reposer toute la charge de responsabilité et économique sur les 25-60 ans) et en plus ça fait des adolescents qui s’ennuient du fait qu'on leur laisse aucun espace pour leurs aspirations à commencer à avoir quelque rôle et responsabilité. La façon dont ça se décline, c'est que lorsqu'on voit une famille où un grand frère ou une grande sœur aide à s'occuper des plus jeunes, on va faire de grands reproches aux parents sur le thème que ce n'est pas son rôle, limite que c'est lui voler son enfance. Et dans les établissements scolaire, on éprouve perpétuellement perpétuellement un manque de personnel éducatif, tandis qu'on a obtenu que la quasi totalité de l'équipe éducative soit recrutée à bac + 5 et qu'on n'imagine toute assistance à un enseignant, accompagnement d'un élève qui a un besoin particulier, aide aux devoirs (sans parler d'un peu de ménage de base pour lequel il est passé de mode de demander la participation d'élèves), que par des adultes qui doivent vivre de leur salaire et payer toutes les cotisations sociales dues. Ce qui coûte des fortunes vu notre niveau de vie et trouve vite ses limites, aucune économie d'échelle n'étant possible pour ce genre de service. |
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 13 Fév 2022, 00:16 | |
| - Daniel à Digne a écrit:
- Un débat complètement hors de propos dans ce forum "vélo couché" mais très intéressant et suivi jusqu'à maintenant avec suffisamment de retenue pour rester lisible.
Retenue ?? Mais de quoi faudrait-il se retenir. Je ne me retiens de rien en tout cas. - Daniel à Digne a écrit:
Il me vient une réflexion, un facteur d'inégalité difficile à corriger et qui touche beaucoup d'enfants je veux dire "l'amour" . ça me parait déterminant dans le développement de la personnalité. Il me semble que cela est un élément d'un ensemble plus global que j'ai appelé "la façon dont on traite les enfants". L'apport d'amour et d'empathie en est un des paramètres à mon sens. - Lavoieverte a écrit:
Je n'ai pas compris l'enchainement, ou bien tu voulais dire "La domination des adultes sur les enfants" ? Je me suis plantée en écrivant, tu as bien rectifié, je voulais dire domination des adultes sur les enfants. - Lavoieverte a écrit:
Quand tu vois une poule élever ses poussins, c'est autant elle qui se préoccupe d'eux, qui les rassemble que les poussins qui s'efforcent de la suivre... Jusqu'à un certain âge. Ayant eu des poules, j'ai vu cette étape où les liens entre les poussins et la mère poule se distendent. À votre avis, est-ce que c'est la poule ou les poussins qui tendent à abandonner l'autre en premier ? Eh bien j'ai vu les deux... Des poussins ayant grandi qui allaient de leur côté tandis que la poule qui avait l'air un peu perdu essayait de continuer à les rassembler et à les mener, comme des poussins qui suivaient encore leur mère tandis que celle-ci commençait à les repousser, genre maintenant ça suffit, vous vous débrouillez. Comme chez les humains je crois ! Excellente idée l'éthologie ! Sans pour autant idéaliser la vie sauvage qui n'a rien de tout rose, le comportement animal est en tout cas un modèle instinctif le plus souvent non biaisé par les variations culturelles que l'on trouve chez l'être humain (qui sont aussi le reflet de l'émancipation humaine par rapport aux contingences naturelles). C'est assez rassurant que les deux parties ressentent le besoin de se séparer ; sans déviation pathologique, quand ça se passe bien, c'est comme ça aussi chez les humains. - Lavoieverte a écrit:
En fait, c'est souvent le fait de pousser un principe à l'extrême qui mène à des bêtises. Cette idée de domination, comme à l'inverse les principes d'éducation du XIXè début XXè siècle comme quoi toute liberté des enfants et adolescents était dangereuse, qu'il fallait les contrôler autant que possible pour assurer leur moralité, que l'obéissance était la vertu capitale. Oui, bien résumé, l'humain a la capacité de partir en vrille dans tous les sens, et les périodes sombres en sont le reflet. - Lavoieverte a écrit:
Philippe Meirieu a dit plusieurs fois que l'éducation est une affaire de tension indépassable (qu'il faut assumer) entre principes opposés : autonomie/assistance, liberté/direction, curiosité spontanée/transmission d'un contenu choisi par l'enseignant ou les programmes, etc. Il faut bien faire du "en même temps", comme on dit en politique ! Toujours cet équilibre, condition nécessaire à une croissance harmonieuse. - Lavoieverte a écrit:
Le "progrès" a consisté à étendre le modèle des lycées militaires ou religieux des bourgeois du XIXè siècle à tout le monde. L'enseignant a toujours la responsabilité de tout : les élèves ont très peu de marge de choix mais c'est aussi très rare qu'on leur confie des petites responsabilités et services qui s'intégreraient dans le fonctionnement. Intéressant, je ne savais pas, pour l'extension d'un modèle bourgeois à toute la société. - Lavoieverte a écrit:
Et quand on atteint l'âge du collège (par exemple, mais ça se décline aussi bien avant qu'après ) on aspire à se voir confier un rôle, à avoir une marge de choix. Meirieu disait que ça pouvait commencer par une consigne qui dise "vous ferez l'exercice 18 OU l'exercice 32 du chapitre 4". Mes enfants sont dans une école à pédagogie Montessori où il y a ce genre d'organisation avec de petites responsabilités ; les enfants appartiennent à l'un des 4 groupes nommés par des couleurs, et chaque "couleur" a chaque semaine des petites tâches (ranger, porter des messages), par rotation. Dans les classes niveau CP-CE1-CE2, les CE2 sont "sizurion" ou "septurion", chargés de veiller au bien-être de leur groupe de 6 ou 7 enfants, c'est une petite responsabilité qui peut aider à faire grandir les enfants qui manquent d'autonomie. Ceux qui sont déjà très autonomes passent plus tôt dans l'autre classe CE2-CM1-CM2 dans laquelle plus d'autonomie est nécessaire. Je n'en ferai pas un idéal car existe aussi une rigidité idéologique basée sur un concept d'enfant parfait qui ne correspond pas à la réalité de tous les enfants. Il faut dire que c'est une école catho, alors les rigidités idéologiques y sont comme qui dirait consubstantielles et on en a fait les frais d'ailleurs, en tant que famille un peu trop originale par rapport à la norme locale . - Lavoieverte a écrit:
Mais dans une sorte de convergence, de mix entre l'éducation très directive voire totalitaire des internats d'il y a un siècle et des idées de protection de l'enfance poussées aux limites, il est devenu communément admis que les enfants et adolescents ne devaient se préoccuper que de leur propre éducation, et à plein temps quasi jusqu'à 20/25 ans, à l'exclusion de tout rôle social, toute responsabilité même dans un petit périmètre et à plus forte raison toute activité productive. C'est très coûteux, c'est déséquilibré (de faire reposer toute la charge de responsabilité et économique sur les 25-60 ans) et en plus ça fait des adolescents qui s’ennuient du fait qu'on leur laisse aucun espace pour leurs aspirations à commencer à avoir quelque rôle et responsabilité.
La façon dont ça se décline, c'est que lorsqu'on voit une famille où un grand frère ou une grande sœur aide à s'occuper des plus jeunes, on va faire de grands reproches aux parents sur le thème que ce n'est pas son rôle, limite que c'est lui voler son enfance. Et dans les établissements scolaires, on éprouve perpétuellement perpétuellement un manque de personnel éducatif, tandis qu'on a obtenu que la quasi totalité de l'équipe éducative soit recrutée à bac + 5 et qu'on n'imagine toute assistance à un enseignant, accompagnement d'un élève qui a un besoin particulier, aide aux devoirs (sans parler d'un peu de ménage de base pour lequel il est passé de mode de demander la participation d'élèves), que par des adultes qui doivent vivre de leur salaire et payer toutes les cotisations sociales dues. Ce qui coûte des fortunes vu notre niveau de vie et trouve vite ses limites, aucune économie d'échelle n'étant possible pour ce genre de service. Oui je comprends mieux ce que tu avais déjà expliqué une autre fois. Dans l'enseignement notamment, un genre de tutorat des plus âgés vers les plus jeunes serait même sans doute pédagogiquement productif. En effet, devoir expliquer quelque chose contraint la cervelle à mieux comprendre, et finalement aide à mieux maîtriser une notion (je ne pense pas que ce soit magique mais ça semble aider, à moins que ce ne soit l'inverse ! qui se conçoit bien s'énonce clairement). Ca pourrait se faire aussi, toujours à l'école, de répartir des tâches de rangement / ménage entre les élèves ; c'est ce qu'ils font à l'école de mes enfants, chez les grands CE2-CM1-CM2, en début de semaine ils s'inscrivent aux différentes tâches à effectuer. Et j'insiste pour ne pas en faire un idéal, mais il y a de l'inspiration à y puiser. |
| | | Lavoieverte Posteur d'argent
Messages : 504 Âge : 50 Localisation : Annecy VPH : Un Quest carbon, un VAE de ville Cannondale, un VTT Date d'inscription : 20/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 13 Fév 2022, 12:03 | |
| - el gato a écrit:
- Lavoieverte a écrit:
Le "progrès" a consisté à étendre le modèle des lycées militaires ou religieux des bourgeois du XIXè siècle à tout le monde. L'enseignant a toujours la responsabilité de tout : les élèves ont très peu de marge de choix mais c'est aussi très rare qu'on leur confie des petites responsabilités et services qui s'intégreraient dans le fonctionnement. Intéressant, je ne savais pas, pour l'extension d'un modèle bourgeois à toute la société.
Je ne suis pas sûr de l'avoir vu écrit comme ça, et il est difficile de dire et distinguer dans le modèle scolaire ce qui vient des institutions catholiques ou d'un modèle voulu par la bourgeoisie pour ses enfants ou encore par des courants laïques de l'État, genre napoléoniens parce que ça s'entremêle sans se recouper exactement. Mais ce qui a été dit par d'autres que moi, c'est d'une part que le système scolaire laïc a repris énormément des institutions éducatives catholiques, même en s'y opposant ; Et puis d'autre part, lorsqu'on a étendu, démocratisé l'enseignement après 1945 ou même plus tôt, c'est passé par l'unification des filières, c'est-à-dire prolonger la scolarité commune et mixte. Et lors de ces unifications, (c'est Meirieu encore qui le relevait notamment) on s'est aligné à chaque fois la filière la plus prestigieuse, sans considération pour ce qui pouvait bien marcher dans la filière populaire par exemple, mais aussi dans la filière des filles quand elle était différente de celle des garçons. C'est une histoire comparable à la réunification allemande. L'Allemagne de l'Ouest était plus riche, prestigieuse et attractive, donc on n'a pas gardé grand chose des institutions de l'Allemagne de l'Est. Cela a du se faire sans beaucoup de débat, dans une sorte de consensus : ceux qui étaient déjà dans la filière prestigieuse n'auraient pas accepté d'abandonner leur base d'enseignement classique, et ceux qui promouvaient l'égalité des chances devaient y voir la voie naturelle pour cela, pour l'ascension sociale. - el gato a écrit:
Mes enfants sont dans une école à pédagogie Montessori où il y a ce genre d'organisation avec de petites responsabilités ; les enfants appartiennent à l'un des 4 groupes nommés par des couleurs, et chaque "couleur" a chaque semaine des petites tâches (ranger, porter des messages), par rotation. Dans les classes niveau CP-CE1-CE2, les CE2 sont "sizurion" ou "septurion", chargés de veiller au bien-être de leur groupe de 6 ou 7 enfants, c'est une petite responsabilité qui peut aider à faire grandir les enfants qui manquent d'autonomie. Ceux qui sont déjà très autonomes passent plus tôt dans l'autre classe CE2-CM1-CM2 dans laquelle plus d'autonomie est nécessaire.
Je n'en ferai pas un idéal car existe aussi une rigidité idéologique basée sur un concept d'enfant parfait qui ne correspond pas à la réalité de tous les enfants. Il faut dire que c'est une école catho, alors les rigidités idéologiques y sont comme qui dirait consubstantielles et on en a fait les frais d'ailleurs, en tant que famille un peu trop originale par rapport à la norme locale .
Oui, la pédagogie Montessori ne réduit sans doute pas toutes les tensions ! - el gato a écrit:
Oui je comprends mieux ce que tu avais déjà expliqué une autre fois.
Dans l'enseignement notamment, un genre de tutorat des plus âgés vers les plus jeunes serait même sans doute pédagogiquement productif. En effet, devoir expliquer quelque chose contraint la cervelle à mieux comprendre, et finalement aide à mieux maîtriser une notion (je ne pense pas que ce soit magique mais ça semble aider, à moins que ce ne soit l'inverse ! qui se conçoit bien s'énonce clairement).
Ca pourrait se faire aussi, toujours à l'école, de répartir des tâches de rangement / ménage entre les élèves ; c'est ce qu'ils font à l'école de mes enfants, chez les grands CE2-CM1-CM2, en début de semaine ils s'inscrivent aux différentes tâches à effectuer. Et j'insiste pour ne pas en faire un idéal, mais il y a de l'inspiration à y puiser. Tout-à-fait. Le comble c'est qu'il y a des choses qui existent et qui sont bien éprouvées en primaire, et quand il s'agit du collège il y a des objections pour ce type d'approche en disant qu'ils sont encore trop jeunes... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Lun 14 Fév 2022, 18:42 | |
| L'école est surement perfectible Mais je constate trop souvent que le 'niveau" baisse pour beaucoup quand ils en sont sortis ; plusieurs raisons
- plus de controle officiel - relachement suite à des études forcées qui ne correspondent pas à sa tendance, ses capacités naturelles - milieu ambiant, professionnel ou voisinage, qui aurait tendance à tirer vers le bas - mode de l'exotisme
- etc ???
|
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Ven 18 Fév 2022, 07:50 | |
| Une source bibliographique ancienne, un peu datée mais intéressante. Il s'agit de "Pour décoloniser l'enfant" de Gérard Mendel, concepteur de la socio-psychanalyse. J'ai lu ça quand j'avais 14 ans, je relisais les phrases 3 fois pour tenter d'y comprendre quelque chose à cet âge tendre L'idée, évidemment dans le contexte de l'époque, était de compléter la lutte des classes par la lutte des classes d'âge. En un sens très précurseur si l'on tient compte des recherches démographiques sur le phénomène baby-boomer et leur influence sociale prégnante. Et pas du tout inintéressant pour la réflexion sur l'autonomie et la prise de responsabilité des jeunes. La lutte des classes d'âge va tout à fait dans le sens de s'opposer à la domination adulte. Ici une note de recherche : https://sharepoint.uclouvain.be/sites/rsa/Articles/1990-XXI-2_07.pdf |
| | | Pr1piat Posteur d'argent
Messages : 426 Âge : 48 Localisation : LE HAVRE VPH : Cruzbike S40 / ex : Speedmachine 2004 (Vole) Date d'inscription : 19/01/2022
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Ven 18 Fév 2022, 18:36 | |
| Sujet passionnant ! Je te rejoins el gato sur le rapport de la societe allemande avec la petite enfance : la femme a la maison ! Sur l'enseignement, il y a d'enormes trous dans la raquette et de plus en plus. On peut critiquer les statistiques (ce que ne manque pas de faire le serail politique surtout quand il est au gouvernement), mais elles sont extremement parlantes sur les competences/le niveau (appelez ca comme vous le souhaitez) des jeunes francais. On plonge depuis plus de 20 ans. Je ne suis pas en mesure de voir aujourd'hui ce qu'est l'ecole de l'interieur (mes filles sont majeures), mais la bonne vieille reproduction de Bourdieu tient toujours la route. Je ne suis ni dans les sciences de l'education, ni dans l'economie hein Et pour terminer, ce qui manque aux enfants selon moi et indispensable : l'esprit critique... Et celui-ci est tellement lie (parce que jamais mis en place dans les cours meme a la fac) a ton background culturel, qu'on retrouve toujours les memes personnes en haut de la malheureuse pyramide. Voila, ce n'etait que ma maigre pierre a l'edifice PS : et encore mes excuses, sur un clavier qwerty, donc sans accent :/ |
| | | Lavoieverte Posteur d'argent
Messages : 504 Âge : 50 Localisation : Annecy VPH : Un Quest carbon, un VAE de ville Cannondale, un VTT Date d'inscription : 20/02/2019
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Sam 19 Fév 2022, 10:51 | |
| - el gato a écrit:
- Une source bibliographique ancienne, un peu datée mais intéressante.
Il s'agit de "Pour décoloniser l'enfant" de Gérard Mendel, concepteur de la socio-psychanalyse. J'ai lu ça quand j'avais 14 ans, je relisais les phrases 3 fois pour tenter d'y comprendre quelque chose à cet âge tendre
L'idée, évidemment dans le contexte de l'époque, était de compléter la lutte des classes par la lutte des classes d'âge. En un sens très précurseur si l'on tient compte des recherches démographiques sur le phénomène baby-boomer et leur influence sociale prégnante. Et pas du tout inintéressant pour la réflexion sur l'autonomie et la prise de responsabilité des jeunes. La lutte des classes d'âge va tout à fait dans le sens de s'opposer à la domination adulte.
Ici une note de recherche : https://sharepoint.uclouvain.be/sites/rsa/Articles/1990-XXI-2_07.pdf C'est une position intéressante, mais qui s'appuie sur des bases qui ont mal vieilli : le freudisme (critiqué comme bien peu scientifique et pas très efficace non plus), le béhaviorisme (comme quoi tout ou l'essentiel est une question de conditionnement) et le marxisme (la lutte des classes posé comme objectif, comme vœu). " la constitution d'une classe d'âge et le refus de l'héritage socio-culturel peuvent devenir le moteur d'un changement nécessaire." Sauf que la propension des enfants, c'est au contraire une soif d'apprendre le contexte culturel dans lequel ils naissent, ils l'absorbent comme ils apprennent à parler. Alors espérer qu'ils vont refuser l'héritage socio-culturel de leurs parents, de leur société, c'est une illusion, et ce serait même une violence d'œuvrer pour que ça arrive. La Convention internationale des droits de l'enfant (mieux inspirée) stipule que l'éducation doit viser à : " c) Inculquer à l'enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne ;" et " Dans les Etats où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ou des personnes d'origine autochtone, un enfant autochtone ou appartenant à une de ces minorités ne peut être privé du droit d'avoir sa propre vie culturelle, de professer et de pratiquer sa propre religion ou d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe." ainsi que en cas de nécessité de placement "il est dûment tenu compte de la nécessité d'une certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique."En gros, elle considère que l'enfant a besoin d'une appartenance, d'un héritage culturel, et d'une identité, d'un respect de ses origines. Un intervenant du film La Educación Prohibida le dit comme ça : " Les enfants absorbent la culture, ils assimilent celle de leurs parents, et cela se voit même dans le langage. Les nombres, les lettres et les mots sans dans le contexte culturel humain, alors ils l'apprennent. Comme ils apprennent à marcher, puisqu'il y a des adultes qui marchent. (...) Il a besoin de naître dans un entourage humain." (Au passage, on peut en tirer que l'école à plein temps avait peut-être une justification qui s'est beaucoup réduite : quand il s'agissait de faire accéder des populations rurales du XIXe siècle à une culture, un ensemble de connaissance, y compris des maths et puis simplement la langue française, c'était peut-être le meilleur moyen. Mais quand ses parents, grands parents etc. et la société en général ont été scolarisés depuis plusieurs générations, il y a beaucoup de choses qui passent comme ça par immersion, transmission informelle. Pourquoi faire passer à tout le monde autant de temps à l'école qu'à la fin du XIXè siècle dans ces conditions ?) Je ne pense pas que la lutte des classes d'âges soit particulièrement développée à notre époque, mais je vois un cas où quelque-chose d'apparenté est défendu du côté des adultes : le ministre Blanquer quand il dit en substance que l'unité (ou la solidarité ?) des adultes face aux enfants et adolescents est fondamentale. Bah c'est un point de vue assez répandu (que les adultes ne doivent pas se contredire devant les enfants...) et dont je pense qu'il n'est pas aussi pertinent qu'il peut en avoir l'air. Quand à l'inverse les adultes n'hésitent pas à dire leurs désaccords, à polémiquer (de façon respectueuse !) devant les enfants, ça donne sans doute à ceux-ci plus de liberté pour se forger leur opinion, et on observe que les enfants, plutôt que de "profiter de la faille", vont se faire leur avis, qu'ils y en a qui vont se ranger de part et d'autre (plutôt conservateurs ou l'inverse par exemple...), ce qui fait tomber ce vœu de Gérard Mendel de lutte des classes d'âge. - jegued a écrit:
- Sujet passionnant !
(...) Je ne suis pas en mesure de voir aujourd'hui ce qu'est l'ecole de l'interieur (mes filles sont majeures), mais la bonne vieille reproduction de Bourdieu tient toujours la route.
Bourdieu a dit beaucoup de choses pertinentes, mais le problème selon moi, c'est qu'il écarte ou ignore toute explication alternative à celles (bien réelles sans doute) qu'il présente. L'idée implicite ou le point de perspective quoique jamais trop dit frontalement, c'est que dans l'idéal, les enfants de médecins deviendraient médecins ou ouvriers strictement dans les mêmes proportions que les enfants d'ouvriers. Ce que cela met sous le tapis, c'est d'une part l'aspect culturel : s'il y a des "classes sociales", est-ce que ce n'est pas une identité ou une culture comparable à celle d'une minorité à qui on reconnait le droit de transmettre sa culture ? Il faut faire en sorte qu'on puisse, qu'on ait le droit d'en sortir, mais sous-entendre que ces appartenances, ces cultures familiales ne devraient n'avoir aucune conséquence statistique sur le destin social et professionnel (puisque tant qu'on voit une corrélation entre les études et métiers auxquels accèdent des enfants et leur origine sociale, c'est décrit comme un échec et une transmission ou voire une aggravation des inégalités), c'est de l'illusion à moins de moyens très contraignants pour en arriver à ce résultat. D'autre part, l'héritabilité de l'intelligence qui n'est même pas vraiment débattue, attaquée, mais plutôt escamotée, ignorée en France, alors qu'elle est plutôt bien établie scientifiquement: voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Mainstream_Science_on_Intelligence |
| | | el gato Accro du forum
Messages : 11440 Localisation : Villeurbanne VPH : Giro 20, divers trucs en jachère, attente de Speedmachine psychédélique Date d'inscription : 25/03/2006
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Sam 19 Fév 2022, 22:13 | |
| - Lavoieverte a écrit:
"la constitution d'une classe d'âge et le refus de l'héritage socio-culturel peuvent devenir le moteur d'un changement nécessaire."
Sauf que la propension des enfants, c'est au contraire une soif d'apprendre le contexte culturel dans lequel ils naissent, ils l'absorbent comme ils apprennent à parler. Alors espérer qu'ils vont refuser l'héritage socio-culturel de leurs parents, de leur société, c'est une illusion, et ce serait même une violence d'œuvrer pour que ça arrive. Refus de l'héritage socio-culturel peut paraître brutal, mais pourtant, il y a bien eu un bouleversement des moeurs. Et le changement était en train d'advenir sous les yeux de Gérard Mendel, mais évidemment sans le recul nécessaire il lui était difficile de le voir. Les changements énormes ont eu lieu pour les baby-boomers nés, disons, entre 1940-1945 et 1955-1960. Cette génération-là a vu de grosses évolutions socio-culturelles, on peut citer par exemple : - la liberté sexuelle, alors que le génération précédente était coincée par l'absence de contraceptifs efficaces - le changement alimentaire avec une alimentation plus riche en viande et en produits laitiers, alors que la génération précédente mangeait avec sobriété, et certains produits animaux avec parcimonie - le changement de classe sociale par l'émergence d'une classe moyenne nombreuse grâce aux années de forte croissance économique Il ne s'agit évidemment pas de refus de l'héritage socio-culturel des parents, mais de fait, une génération s'est créé une nouvelle culture. C'est ainsi que dans l'alimentation, la consommation de légumineuses (protéines végétales) a chuté tandis que les produits laitiers et la viande devenaient très populaires. - Lavoieverte a écrit:
La Convention internationale des droits de l'enfant (mieux inspirée) stipule que l'éducation doit viser à : "c) Inculquer à l'enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne ;" et "Dans les Etats où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ou des personnes d'origine autochtone, un enfant autochtone ou appartenant à une de ces minorités ne peut être privé du droit d'avoir sa propre vie culturelle, de professer et de pratiquer sa propre religion ou d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe." ainsi que en cas de nécessité de placement "il est dûment tenu compte de la nécessité d'une certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique."
En gros, elle considère que l'enfant a besoin d'une appartenance, d'un héritage culturel, et d'une identité, d'un respect de ses origines. Si on applique le raisonnement strictement, on peut aboutir à des dysfonctionements. |
| | | meg2 Accro du forum
Messages : 1255 Localisation : Grenoble VPH : vélo Wolf & Wolf AT2 ; trike AZUB Ti-Fly. Avant : HP-V Grasshopper ; vélo droit Cattin. Date d'inscription : 06/05/2018
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 20 Fév 2022, 04:17 | |
| - jegued a écrit:
- pour terminer, ce qui manque aux enfants selon moi et indispensable : l'esprit critique... Et celui-ci est tellement lie (parce que jamais mis en place dans les cours meme a la fac) a ton background culturel, qu'on retrouve toujours les memes personnes en haut de la malheureuse pyramide.
qu'est-ce qui vous permet d' asséner un tel jugement aussi catégorique que réducteur sur les formations universitaires ? J'y enseigne, et dans nos enseignements, on évalue au moins autant, sinon plus, les étudiants sur leur capacité à tester, valider ou critiquer des hypothèses, qu'à restituer des connaissances. Du moins en fac dite de "sciences dures" (les autres, je connais mal). Mais en haut de la pyramide des gens qui ont du pouvoir et/ou beaucoup de fric, il y a peu de scientifiques, et quand il y en a, ils viennent rarement de la fac...
Dernière édition par meg2 le Dim 20 Fév 2022, 10:34, édité 1 fois |
| | | Manouche ***
Messages : 161 Localisation : Languedoc, entre Corbières, Minervois et littoral VPH : Aliaciklo Date d'inscription : 10/12/2021
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle Dim 20 Fév 2022, 10:24 | |
| - meg2 a écrit:
- jegued a écrit:
- pour terminer, ce qui manque aux enfants selon moi et indispensable : l'esprit critique... Et celui-ci est tellement lie (parce que jamais mis en place dans les cours meme a la fac) a ton background culturel, qu'on retrouve toujours les memes personnes en haut de la malheureuse pyramide.
qu'est-ce qui vous permet d' asséner une telle aussi catégorique que réductrice sur les formations universitaires ? J'y enseigne, et dans nos enseignements, on évalue au moins autant, sinon plus, les étudiants sur leur capacité à tester, valider ou critiquer des hypothèses, qu'à restituer des connaissances. Du moins en fac dite de "sciences dures" (les autres, je connais mal). Mais en haut de la pyramide des gens qui ont du pouvoir et/ou beaucoup de fric, il y a peu de scientifiques, et quand il y en a, ils viennent rarement de la fac... Il y a deux choses dans l'intervention de Jequed et celle de Meg2 : Ceci est juste mon témoignage : ... concernant l'esprit critique des enfants.J'ai eu l'occasion de faire des interventions au collège et en lycée. Jeunes, les enfants répètent ce qu'ils ont entendu à la maison et lorsque la télévision est allumée chez eux. Il sont heureusement sensibles quand on leur renvoie leurs affirmations, en les questionnant. Parfois c'est même un camarade qui prend l'initiative de démontrer que la réponse du copain n'est pas correcte. Ces interventions, faites par l'intermédiaire d'une association qui a un agrément, étaient initiées par le principal. J'espère que le travail a été poursuivi ensuite. On leur dit qu'ils peuvent vérifier ce que nous avons apporté. Plus âgés, lycée, ils ont déjà réfléchi par eux-mêmes. Sur notre compétence, on leur apporte des chiffres, des textes de loi, et témoignages. On conforte, on complète, on corrige ce qu'ils peuvent savoir ou avoir étudié ... Là, c'était à l'initiative d'une prof. Libres à eux d'aller vérifier ce que l'on a dit. On le leur suggère aussi. En général, c'est dans le secteur public que l'on trouve des enseignants qui arrivent à faire réfléchir les enfants et les jeunes par eux-mêmes. Il y a des exceptions dans le secteur privé , par exemple, les écoles genre Montessori, et, par chez moi, les calandretas Ensuite, j'ai dans mon entourage, copains ou familles, des enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs, plutôt dans le public. Dans le public, un chercheur ou un enseignant-chercheur a plus de liberté pour orienter ses recherches dans l'intérêt collectif. S'il est prié de s'en tenir au dogme officiel (c'est à dire politique), il démissionne ou subit des pressions (auxquelles il arrive à résister : l'avantage du statut ! Dans le privé un chercheur est lié à une société, entreprise, qui recherche son profit et rien que son profit. Les politiciens (au sens que l'on donne au Québec) : Pour ce que je connais des politiques, ce sont ceux qui en font une carrière en oubliant la réalité du terrain. Une possibilité : former des groupes de pressions : lobbies, mais il faut avoir un bon carnet d'adressses. Dans les "hautes sphères" politiques, les origines et les parcours des étudiants ne sont pas les mêmes. Il suffit de lire les biographies de chacun. Et le coût des études n'est pas le même ! Sélection par l'argent ?! Argent et recherche du pouvoir, accès au pouvoir et argent. Bon, tous ne sont pas pourris, mais d'une part, ce ne sont pas les meilleurs, ceux qui seraient intéressés par le bien collectif, qui sont en haut, d'autres part, au cours de leur carrière, certains, qui pouvaient être sincèrement engagés, oublient pourquoi et par qui ils sont là. Et, il y a la réalité du monde ... Et, je reviens au début de mon message : en ce qui concerne les media et les journalistes, il doit y avoir des réponses dans ce film qui sort en ce moment. C'est pareil, tous les journalistes ne sont pas pourris, mais comment peuvent-ils faire du bon travail ? Ligne éditoriale (qui la dicte ?), pas de moyens pour faire de l'investigation, quel que soit le sujet. Manouche |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: décroissance scolaire et culturelle | |
| |
| | | | décroissance scolaire et culturelle | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|