Libération "Made in Belgique"

Le numéro spécial Belgique de ce 28 novembre ayant été très vite introuvable, il est disponible gratuitement en pdf (au moins en Belgique, en France je ne sais pas si ça fonctionne)
Voir PDF Libé "Made in Belgique"

J'en ai lu quelques articles. J'ai également vu quelques reportages beaucoup moins optimistes qui mettaient en avant une xénophonbie entre Flamands et Wallons.
J'apprécie beaucoup les Belges de ce forum, et j'aimerai mieux comprendre la situation. Pouvez vous nous donner un témoignage de l'intérieur?
Cordialement.

le pdf de libé marche très bien en france .
pas mal, on apprends plein de choses sur la belgique

Il est probable que le ver de la désunion est dans le fruit belge depuis la création du pays (par la volonté des grandes puissances européennes du début XIX°). La crise actuelle est dans la ligne de l'évolution des 40 dernières années (régionalisation de plus en plus poussée) qui fait que chacun vote chez lui, que les politiciens ne se parlent plus par dessus la frontière linguistique, donc ne se connaissent plus.
La xénophobie n'est le fait que d'une minorité d'extrémistes, je pense (plus au N qu'au S me semble-t-il), néanmoins des thèmes proches sont électoralement porteurs en Flandre.
Vu de mon petit patelin au sud de Liège, je n'ai pas plus de contact avec des Flamands qu'avec des Hollandais de Maastricht ou des Allemands d'Aix-la-Chapelle, qui sont tous à égale distance (env. 40 km, Liège est la pointe septentrionale de la francophonie, enfoncée comme un coin dans les territoires de langue germanique). Quand on rencontre des Flamands, c'est toujours cordial, sans pollution politicienne.
Dernière anecdote en date: un couple de cyclos gantois m'a appelé pour solliciter un logement pour faire étape lors d'un petit voyage cyclo en Ardennes (j'ai ainsi appris que j'étais toujours repris dans la liste CAC du CCI). Il me parlait en français, hésitant, certes mais bien meilleur que mon néerlandais plus que lacunaire; ce cas est assez représentatif je pense.
Il y a des régions du pays ou c'est plus difficile, là où les 2 langues se côtoient.
J'estime que ces évènements sont assez lamentables, les nationalismes me hérissent (Einstein disait que c'est la rougeole de l'humanité), alors qu'on essaie de construire l'Europe, les soubresauts de ce petit pays sont risibles.

Vindwa a écrit:

les nationalismes me hérissent

Vindwa a écrit:

Il y a des régions du pays ou c'est plus difficile, là où les 2 langues se côtoient.
J'estime que ces évènements sont assez lamentables, les nationalismes me hérissent (Einstein disait que c'est la rougeole de l'humanité), alors qu'on essaie de construire l'Europe, les soubresauts de ce petit pays sont risibles.

Quelque chose m'échappe... Comment se fait-il que l'enseignement des deux langues ne soit pas obligatoire dans toute la Belgique? Pour vivre en paix, la compréhension de l'autre me semble passer au minimum par la connaissance de sa langue et de sa culture...

aragomax a écrit:

Quelque chose m'échappe... Comment se fait-il que l'enseignement des deux langues ne soit pas obligatoire dans toute la Belgique?

Bien que la question de la langue ne soit qu'un aspect du problème, la situation serait certainement moins grave si, en effet le bilinguisme avait été obligatoire pour tous (ou même le trilinguisme, puisqu'il y a une région germanophone à l'est de la province de Liège).
Je ne suis pas sûr de connaître la réponse à ta question. La source est encore, sans doute, à chercher dans les origines historiques du pays.
Avant 1830, la région était sous domination hollandaise, et un des évènements fondateurs du pays consista à repousser ceux-ci chez eux. Toutes les classes dirigeantes (y compris flamandes), les "élites", le haut-clergé de l'époque, et ce, pendant les premières dizaines d'années de vie de la Belgique, utilisaient le français, qui n'était pas compris par le peuple flamand, ni, dans une moindre mesure, par le wallon d'ailleurs (jusqu'il y a peu, il existait encore un quotidien francophone à Gand; la constitution n'a connu sa traduction officielle en néerlandais qu'en 1967..., tu as sans doute lu ces histoires de la guerre de 14 pendant laquelle les soldats flamands étaient envoyés au casse-pipe par des officiers francophones qu'ils ne comprenaient pas...). Il y a eu une volonté d'assimilation des Flamands en imposant le français comme langue officielle qui à la longue aurait conduit à l'extinction du flamand, afin d'assurer l'unité du pays.
Le mouvement flamand a grapillé progressivement sa reconnaissance et ses droits.

Pour éviter de dire trop de bêtise, je te renvoie vers cette page: Petite histoire de la Belgique et ses conséquences linguistiques

Il y a quelques similitudes avec la situation Suisse. Comment est gérée le multilinguisme dans la confédération Helvétique?

aragomax a écrit:

Pour vivre en paix, la compréhension de l'autre me semble passer au minimum par la connaissance de sa langue et de sa culture...

On est mal parti pour l'Europe !
C'était déjà ma théorie il y a 40 ans où je souhaitais qu'on traite ce pb avent les pb de monaie (traités bien artificielement d'ailleurs)
En France les socialistes ont réouvert des classes de breton ...

Le bilinguisme obligatoire avait été proposé par les Flamands aux alentours des années 1930 et les Francophones ont bloqués ce projet et obtenu son abandon. Pour les politiciens francophones de l'époque (et pour pas mal d'aujourd'hui) ce fut une grande victoire. Cela dit ce n'est pas la cause unique de nos problèmes. L'économie y joue un grand rôle ainsi qu'un certain esprit nationaliste et revanchard (voir Vindwa)

En ce qui me concerne, mes arrières grand parents paternels étaient anversois (flamand donc) et sont venus s'installer en Wallonie début des années 30 parce qu'il y avait du travail en Wallonie (il faut savoir que l'économie belge a toujours été cyclique, un tour c'est bon pour la Flandre, un tour pour la Wallonie) Du côté maternel c'est du 100% wallon.
Mon épouse est également d'une famille d'origine flamande qui s'installa à Bruxelles. Et nous voilà tous les 2 à Liège.
Il y a de chaque côté de la frontière linguistique des tas de belges métis flamand/wallon et il y a une minorité de nationalistes mais pour certains politiciens surfer sur la vague du nationalisme et accusés l'autre de tous les maux est bien plus facile que de construire de vrais projets de société et de résoudre les problèmes du citoyen.

Un exemple: certains politiciens flamands expliquent que dans la sécurité sociale il y a trop de transfert d'argent du Nord vers le Sud. Ils oublient cependant de dire que ces transferts sont surtout dûs à toute une série de maladies professionnelles liées aux charbonnages et l'industrie lourde qui ont fait vivre la totalité du pays jusqu'à disons une trentaine d'années et qui étaient majoritairement situées en Wallonie. A la même époque, la Flandre était surtout une terre d'agriculteur. Les industries et les charbonnages ne sont plus là mais les travailleurs parfois bien âgés si. Ils oublient aussi d'expliquer que d'ans une dizaine d'années la Flandre va avoir du mal à payer les pensions si elle décide de se passer de la solidarité nord/sud. Tout ceci a fait l'objet d'étude universitaires en Flandre mais les résultats ne sont guère étalés dans le grand public.

Le problème est bien plus complexe qu'un simple conflit linguistique et malheureusement les politiciens ...euh non je dirai rien

A propos des politiques, la soeur du président de l'aile la plus anti-belge (cfr Le Monde d'hier) d'un des partis en train de négocier, flamand pur jus, est chômeuse à Arlon (sud de la Wallonie).

Comme quoi, rien n'est vraiment simple dans ce drôle de pays !

ALagrange (Alex) a écrit:

Il y a quelques similitudes avec la situation Suisse. Comment est gérée le multilinguisme dans la confédération Helvétique?

Historiquement, bien.
Actuellement, mal.
Depuis que les amis du 3e Reich ont mis la main sur la politique du pays, ça tourne à la fanfaronnade.
Il va falloir faire le gros dos et attendre que cette maladie nationale passe. On a chopé le virus du populisme à deux balles, mais ça va passer, et le retour à un plurilinguisme respectueux pourra se faire comme d'habitude en Suisse, c'est à dire calmement et sans remous.
Chaque enfant doit apprendre au moins une autre langue nationale en priorité, puis l'anglais. Ainsi, on peut toujours communiquer entre 2 suisses. Beaucoup ont des notions des 3 langues.
Remarque personnelle: la majorité des gens que j'estime dans ce pays ont une connaissance des 3 langues, de l'anglais et souvent de l'espagnol. Je cherche le lien depuis plusieurs années, probablement une question d'ouverture d'esprit initiale ou acquise lors de ces apprentissages successifs. Apprendre une langue c'est aussi découvrir une culture, et cela évite souvent la peur de l'autre. Ici, les romands sont plus latins et les suisse allemands plus germaniques dans leurs comportements, donc en general ils sont plus serieux et nous d'humeur plus joviale. Cette différence est élevée en problème par une certaine droite politique, alors que depuis 20ans la majorité s'en sert comme d'un avantage: au travail, les suisse allemands tiennent la ligne pour limiter les dérives, et durant les moments libres les romands dérident l'ambiance ce qui soude le groupe. C'est un peu caricatural mas pas si faux dans les faits.
Au lieu de se taper dessus, on s'unit pour profiter des forces de chacun.

Au niveau des individus cela s'est toujours bien passé, ce n'est qu'au niveau politique que ça pêche. Avec en cadeau les groupuscules extremistes qui vont avec, bien sûr.

Bonjour,

L’Europe, que nous aimons tous, souffre malheureusement des intentions de ses décideurs.
En 1961, LE PRESIDENT, un très bn film d’Henry Verneuil, magistralement joué par Jean Gabin, nous mettait déjà en garde.

Je vous glisse, à méditer, un extrait de la prose visionnaire de Michel Audiard

Dominique Perruchon


« Gouverner ne consiste pas à aider les grenouilles à administrer leur mare !... Tout le monde parle de l'Europe... Mais c'est sur la manière de faire cette Europe que l'on ne s'entend plus... Je peux, Messieurs, vous en énoncer d'avance le principe !...
La constitution de trusts verticaux et horizontaux, de groupes de pressions qui maintiennent sous leur contrôle non seulement les produits du travail, mais les travailleurs eux-mêmes !...
On ne vous demandera plus, Messieurs, de soutenir un ministère, mais d'appuyer un gigantesque conseil d'administration !...
Si cette assemblée avait conscience de son rôle, elle repousserait cette Europe des maîtres de forges et des compagnies pétrolières... Cette Europe, qui a l'étrange particularité de vouloir se situer au-delà des mers, c'est-à-dire partout... sauf en Europe !... Car je les connais, moi, ces européens à têtes d'explorateurs !
- Je demande que les insinuations calomnieuses que le Président du Conseil vient de porter contre les Élus du Peuple ne soient pas publiées au Journal Officiel.
- J'attendais cette protestation... Je ne suis pas surpris qu'elle vienne de vous, Monsieur Jussieu... Vous êtes, je crois, conseil juridique des aciéries Krenner ?... Je ne vous le reproche pas...
- Vous êtes trop bon !...
- Je vous reproche simplement de vous être fait élire sur une liste de gauche et de ne soutenir à l'Assemblée que des projets d'inspiration patronale !
- Il y a des patrons de gauche, je tiens à vous l'apprendre !
- Il y a aussi des poissons volants, mais ils ne constituent pas la majorité du genre !...
La politique, Messieurs, devrait être une vocation... Elle l'est pour certain d'entre vous... Mais pour le plus grand nombre, elle est un métier... Un métier qui, hélas, ne rapporte pas aussi vite que beaucoup le souhaiteraient, et qui nécessite d'importantes mises de fonds car une campagne électorale coûte cher ! Mais pour certaines grosses sociétés, c'est un placement amortissable en quatre ans... Et s'il advient que le petit protégé se hisse à la présidence du Conseil, le placement devient inespéré... Les financiers d'autrefois achetaient des mines à Djelitzer ou à Zoa, ceux d'aujourd'hui ont compris qu'il valait mieux régner à Matignon que dans l'Oubangui et que de fabriquer un député coûtait moins cher que de dédommager un Roi Nègre !... "

Cet extrait donne un éclairage bien intéressant sur les discours de nos politiques en cette heure où le formateur a rendu son tablier

1961...
Le temps passe, les manipulateurs restent...
Désolant.