Diagonales Menton-Hendaye-Dunkerque-Menton

En septembre 2010, après la longue période de vacances estivales, je reprends contact avec mon ami Laurent. Dans mon mail pour reprendre des nouvelles, je sous-entends un éventuel projet de diagonale. Laurent me répond qu’il envisage un triangle Menton-Hendaye-Dunkerque-Menton. De fil en aiguille, nous nous motivons l’un l’autre et décidons de conclure ce beau projet par une diagonale à 2 entre Dunkerque et Menton. Quelques obstacles restent à lever : la licence, l’inscription auprès de l’Amicale des Diagonalistes de France, une date commune de disponibilité professionnelle et personnelle. Enfin tous les obstacles tombent un à un et le projet est lancé.

Si la préparation peut sembler précipitée, elle est le fruit d’une année de réflexions. Ces projets étaient en germination dans nos esprits et c’est leur concrétisation qui est soudaine. Fanfan70 rencontré l’année dernière sur Dunkerque Perpignan m’a inspiré mon cadeau de Noël : une carte de France d’un mètre carré affichée dans mon bureau et que je regarde régulièrement. La satisfaction tirée de notre diagonale précédente, les brevets BRM réalisés dans l’année et la perspective de Paris-Brest-Paris en 2011 sont des motivations supplémentaires.

Le découpage des étapes se fera en fonction des possibilités de trains pour aller à Dunkerque et rentrer de Menton. Difficile de monter un vélo à Dunkerque, seul le TGV de 5h21 au départ de Grenoble le permet. Heureusement, avec l’aide de Marcel, je peux choisir un train plus commode partant la veille au soir. Cyclochica m’hébergera à Paris et je pourrai être à Dunkerque le mercredi 29 septembre 2010 à 9h pour un départ tranquille avant midi. Merci à Claire pour l’accueil et Stéphane pour le gratin de pâtes et surtout le succulent moelleux au chocolat. Pour le retour, le dernier train possible est celui de 11h44. Cela nous laisse moins que le délai autorisé, c’est un risque, mais nous n’avons guère le choix. C’est décidé, le découpage sera :

Mon train pour Dunkerque s’arrêtera à Lille. Un colis suspect a été repéré et je dois finir le trajet en TER. Arrivée à Dunkerque à 10h30, finalement. Rien de grave, nous avons le temps.
Le changement de train sera l’occasion de faire connaissance d’un diagonaliste qui a fait Dunkerque-Hendaye l’année précédente avec 4 autres compagnons, qui a 2 PBP à son actif. Notre discussion sera orientée grande distance et j’apprendrai beaucoup.

Première étape, mercredi 29 septembre 2010, je retrouve Laurent à la gare, prêt à partir. Je souhaiterais prendre un café, mais il me propose de pointer au commissariat et de prendre le café à Bergues. J’accepte. Nous retrouvons Zapilon devant le commissariat, il nous photographie en train de faire valider nos carnets de route à 10h50 et prenons la route.

Déjà en Isère?

A Bergues nous prenons un petit déjeuner, tardif, postons quelques cartes postales, pour le délégué fédéral et pour nos enfants, et repartons sur les douze coups de midi. Le temps est gris mais doux et il ne pleut pas. Les kilomètres défilent, Cappel, Hazebrouk, Béthune, Arras, Bapaume, Péronne et enfin Ham vers 19h30. C’est moins difficile que pour Amiens, lors de notre précédente diagonale, DP.

La douche du diagonaliste

Nous sommes accueilli chez des amis de Laurent. On nous offre un bon lit et un super repas de spaghetti à la bolognaises. Parfait pour les diagonalistes. Demain une longue étape, entre 320 et 350 km nous attends. Le réveil est réglé sur 4h15 pour un départ à 5h. Merci à Philippe et Véro pour cet accueil, super sympa et parfait.

Seconde étape,
jeudi 30 septembre 2010, le temps est maussade, mais assez doux. Après quelques kilomètres, un crachin que l’on qualifiera de « breton » tombe. Tout est mouillé, mais pas détrempé. Nous arrivons à Soissons par la D1, et la descente sinueuse, sur route mouillée avec un camion au derrière me laisse un souvenir angoissé. Après un pointage dans le seul café ouvert, nous repartons par des routes moins fréquentées. Il pleut par intermittences, mais finalement c’est presque agréable. Près de Condé en Brie, deux cueilleuses nous offrent des pommes pulpeuses et juteuses qui nous désaltèrent. A Villenauxe la Grande, la faim et l’humidité nous poussent à prendre une collation chaude au café du village. Nous estimons que nous ne pourrons pas atteindre Pouilly en Auxois dans la soirée et cherchons un hébergement à Semur en Auxois. Le gîte de la Tour Margot ne veut pas nous réserver une chambre par téléphone. Tant pis, nous verrons plus tard. Je demande à Armelle par téléphone si elle peut nous trouver des coordonnées d’hôtels à Semur (30 km avant Pouilly). En repartant, nous apercevons le supermarché « Diagonal », petit clin d’œil à notre randonnée.

Après un pointage rapide à la pharmacie de Marcilly le Hayer, nous continuons, mais un tronçon de route barrée nous impose un détour par la N77 très désagréable, surtout sous une forte averse, puis Flogny-la-Chapelle. À partir de là nous retrouvons une route avec un excellent revêtement et peu de dénivelé. Nous passons Tonnerre vers 18h30. Nous contactons l’hôtel du Commerce, à Semur en Auxois, qui nous réserve une chambre sans problème et nous attends jusqu’à 21h pour dîner. Après ils nous laisserons des sandwichs dans la chambre. Accueil téléphonique charmant. La pluie a cessé et nous roulons jusqu’à Montbard et enfin Semur que nous atteignons vers 21h30. L’accueil réel est tout aussi charmant, les cuisines n’étant pas tout à fait close, on nous propose le menu du jour. Les sandwichs déjà dans nos chambres seront notre casse-croûte du lendemain. Parfait. Un repas, une bière, une douche et dodo !

vendredi 1er octobre 2010. Nous programmons notre départ à 4h15. Il fait étonnamment doux ce matin. La météo est plutôt bonne, le moral est au top. Dans mon enthousiasme ; je veux optimiser le réglage de mon dérailleur qui avait quelques ratés la veille, sans doute à cause de l’humidité. Malheur, le mieux est parfois l’ennemi du bien ! J’endommage l’extrémité de mon câble, me vois dans l’obligation de mettre un câble neuf que j’ai pensé à prendre dans ma sacoche. Mais, mais, il est trop court de 10 cm. Impossible de remonter correctement le dérailleur. Je peste, Laurent cherche dans ses affaires, rien ! Finalement, en désespoir de cause, j’accroche l’extrémité du câble à une butée fixe du cadre, sous le siège, et tend le ressort du dérailleur pour maintenir la chaîne sur un pignon intermédiaire. J’aurai 3 vitesses en jouant sur les plateaux. Heureusement qu’en vélo couché la ligne de chaîne est longue. Dès que possible, j’achèterai un câble de la bonne longueur (>2m20). En attendant il faut y aller, vaille que vaille.

A Pouilly, une brume froide et humide nous enveloppe. Au premier café, nous prenons une boisson chaude. Le soleil se levant nous abordons les reliefs de Bligny sur Ouche. Après une erreur de navigation, nous entrons à Beaune puis rejoignons Chagny. Là je trouve une boutique qui a, au fin fond d’une boîte, un câble de dérailleur de 2m50. Je le monte et nous repartons, sous le soleil, l’esprit léger, bien que légèrement en retard.

Une limace nous guide ;-)

Givry, la voie verte, les kilomètres défilent dans le calme, en me rappelant des souvenirs de ma première rando en cyclo camping avec mes enfants. Le tunnel du Bois Clair a été fermé ce jour, tant pis nous prendrons le col du même nom. Nous faisons une agréable descente vers Mâcon puis Crêches sur Saône. Une pause et nous repartons vers les Dombes puis Bourgoin-Jallieu où Marcel doit nous rejoindre. Il attendra un peu car nous avons environ 2h de retard sur la feuille de route initiale. Après un petit détour par la centrale Nucléaire du Bugey (+8 km) nous retrouvons Marcel à Loyettes. Il est venu à notre rencontre. Nous ferons la route ensemble jusqu’à Apprieu à 3. Après Bourgoin, la route monte un peu, mais la proximité d’un logement nous motive, et surtout motive Laurent qui va passer chez lui après une douzaine de jours de vélo.

Attention, ce n’est qu’une étape, il faudra repartir le lendemain ! Mais Aude et leurs enfants sont en rail pour Menton. L’arrivée est tardive, la nuit sera courte, mais nous sommes confiant, content et une belle étape nous attend le lendemain. Une étape qui emprunte le parcours du BRM300 de Grenoble, organisé par Jean Philippe Battu, jusqu’à Aspres sur Buëch. Pizza, douche, dodo.

samedi 2 octobre 2010. Le départ est programmé à 5h30. Un peu après 6h nous rencontrons Pierre qui vient à notre rencontre sur la digue de l’Isère. Sympa ! Nous continuons ensemble jusqu’à Pont de Claix où nous faisons le plein à la boulangerie. Elle est excellente. Puis nous attaquons la montée du col du Fau. Laurent part devant, son rythme est plus rapide que le mien. Pierre reste à ma hauteur. J’ai les jambes un peu raides de la veille, et surtout d’être un peu passé en force en Bourgogne sans dérailleur. Mais la météo est excellente et les paysages superbes.

Après une courte pause au col, nous attaquons le Trièves avec ses merveilleuses couleurs d’automne. A Lalley, surprise, Jean Philippe Battu nous arrête, au sifflet, pour nous offrir un petit déjeuner. Cela tombe bien, nous voulions faire une pause avant le dernier raidillon du col de la Croix Haute. Jean Philippe en profite pour nous interviewer et photographier dans la partie sommitale. Après quelques remerciements et salutations, Laurent et moi partons vers Aspres. Jean Philippe nous suivra pour aller à Veynes et Pierre rentrera par le Trièves.

Pas de chance, le vent est du Sud, donc défavorable. Tant pis, nous avons 50-60 km de faux plat descendant, la moyenne sera correcte. A Serres, un imbécile de camionneur nous double pendant un rétrécissement . Je manque d’être projeté contre la rambarde. L’accident est passé près. Nous nous arrêtons au village pour pointer et manger une salade. La route jusqu’à Sisteron est facile, bien qu’un peu fréquentée à mon goût. Le Nord ne jouit pas de paysages et d’une météo si clémente, mais je m’y sentais plus respecté.

À la sortie de Sisteron, j’indique à Laurent de prendre la rive gauche de la Durance, en direction de Volonne. Mais c’est que ça grimpe ! Pas grave, la route est belle. Nous faisons une petite pause avant de rejoindre la Nationale en direction de Dignes. Avant Digne, nous coupons par Le Chaffaut. C’est un bon et agréable raccourci. Nous traversons les Cluses de Chabrières en fin d’après midi (que c’est beau !) et atteignons Barrême. Une petite pause et nous repartons vers St André les Alpes que nous souhaitons atteindre avant 20h30 pour manger au restaurant. Le soleil s’est caché derrière les reliefs, la circulation est devenue très peu dense. A l’entrée de St André nous apercevons l’enseigne d’un restaurant. L’accueil est sympathique et l’on nous sert rapidement un menu de Lasagnes accompagnées d’une salade. Je repartirai bien pour Menton, mais Laurent, plus raisonnable me convainc de réserver une chambre à Pont Durandy, 30 km avant Nice.

En repartant de St André des Alpes, sur la route du col de Toutes Aures, je vis un moment incroyable de plénitude à vélo. Tout est parfait, le vélo, la route, les jambes, la nuit, les odeurs, tout. C’est si bien que j’appelle mon épouse pour partager ce moment avec elle et la remercier de me permettre de telles aventures.
Le col atteint, il ne nous restera plus que de la descente jusqu’à Nice et une trentaine de km jusqu’à Menton. Le but approche. Il est tard, et malgré l’enthousiasme, le sommeil nous gagne. Nous roulons prudemment, mais doucement. Une petite crevaison nous retarde de quelques minutes et nous atteignons Pont Durandy vers 1h du matin. Heureusement que nous passons dans ce coin, ces tunnels et ces routes à deux voies à une heure si tardive. En heure de pointe cela doit être infernal.
Douche et dodo, demain nous repartirons à 5h.

dimanche 3 octobre 2010, 5h, la route est déserte, les quelques heures de sommeil nous ont bien requinqués et nous roulons vers Nice que nous atteignons à 6h. Il fait doux, c’est le Sud ! Nous mettons une tenue courte, postons notre dernière carte postale et partons pour la Menton par la corniche basse. Au fil des km et des minutes, le jour se lève dévoilant une Méditerrannée azure. Les gens dorment encore, la route est à nous.

Enfin arrive Menton et son commissariat. OUI !! nous sommes arrivés. La famille de Laurent nous rejoint. Ce sont des retrouvailles touchantes à voir. Laurent était parti 14 jours plus tôt. Il a réussi son fabuleux défi, « Randonner Autour de la France » : 3500 km, seul, sans assistance en 14 jours. Je suis fier de l’avoir accompagné sur la dernière diagonale.

Arrivée
Le temps d’une douche et nous rejoignons le buffet petit-déjeuner de l’hôtel réservé par Laurent pour sa famille. Nous lui faisons honneur (au buffet) et nous resservons plusieurs fois. Il nous reste 2h jusqu’au départ du train, 2h que nous passerons sur la plage. L’eau est excellente.
11h45, le train part pour Nice, puis Marseille, puis Lyon, puis Grenoble, mais c’est une autre aventure, au moins aussi éprouvante que DM.
J’arrive à 1h30 lundi matin à la maison et règle le réveil pour 7h. Demain la journée, la semaine seront dures à cause du manque de sommeil, mais surtout parce que je ne pourrai plus rouler des heures avec mon ami. Ah je rêve déjà d’une autre diagonale, Brest Menton ? Brest Strasbourg ? Le choix est vaste, de quoi rêve encore.